jeudi 17 septembre 2015

600 000 $ de factures impayées par des personnalités politiques au Liban ?


Et l’on s’étonne encore que les choses ne changent pas vraiment au ‪‎Liban‬. Il parait qu'il y a deux jours, un juge libanais aurait eu le courage d’ordonner à l’Electricité du Liban, de couper le courant électrique qui alimente les domiciles et les bureaux de dizaines de personnalités libanaises, à cause de leurs impayés, 600 000 $ au total. Inutile de préciser que ce n'est qu'une goutte d'eau par rapport à la dette abyssale du pays du Cèdre, qui s'élève à 67 milliards $. Toujours est-il qu'aujourd’hui, toute la presse en parle avec une langue de bois digne de la classe politique elle-même ! Une brève recherche m’a permis de constater que l’info est rapportée par tout le monde mais que l’écrasante majorité des médias libanais n’ont pas publié les noms des fautifs. L’anonymat et la discrétion rendent bien des services. En tout cas, le quotidien Addiyar fait exception. Dans cette black-list, on y trouve des hommes politiques, des députés, des ex-députés, des ex-ministres et deux cerises sur le gâteau, une star de la chanson et un toubib star. Je vous propose ma sélection, classement crescendo :

- Mohsen Dalloul, ex-député et ex-ministre, grande figure de la collaboration avec l’occupant syrien, qui s’est engraissée pendant l’occupation syrienne du Liban. Il doit seulement 5 300 $ à l’EDL, à qui il interdit l’inspection de ses compteurs. Ah, ça c’est louche.
- Ghazi Zeatir, ministre à plusieurs reprises, actuellement ministre des Travaux publics et des Transports, député since 1996 (bloc Berri). Il doit 7 300 $ à EDL.
- Mohammad Kabbani, député (Futur), since 1992 (avec un petit trou entre 1996 et 2000). Il doit 10 000 $ à l’EDL. Avant que je n’oublie, MK est président de la commission parlementaire des Travaux publics, des Transports, de l’Energie et de l’Eau, since 2000. Il est quand même favorable à la dénonciation des mouhmilinn, lui compris.
- Abdel Latif el-Zein, député since 1962 (bloc Berri encore). Oui vous avez bien lu, non je n’ai pas fait d’erreur de frappe, c’est bel et bien since 1962 ! ALEZ doit à EDL, la modique somme de 14 000 $, ce qui représente un peu plus que le salaire d’un mois de travail. Inutile de s’étendre sur le dur labeur du député libanais ! Au passage, depuis 1962, le doyen des députés libanais a reçu 636 fiches de paie. Ça fait rêver.
- Le chanteur Melhem Barakat, doit 18 000 $ à EDL. Tiens, je suus curieux de savoir, combien de réveillons ou de fractions de réveillons cela représente ?
- Sami el-Khatib, le célèbre Sami el-Khatib lui-même. Pour info, c’est un ex-officier des Renseignements de l’armée libanaise (suspendu de ses fonctions pendant un temps, pour ingérence politique, restriction des libertés et gaspillage de l’argent public), un ex-officier des Forces de dissuasion arabe (qowat elrade3 el3arabiya, smallah!), réfugié politique chez les Assad (jusqu’en 1982), ex-commandant de la branche dissidente de l’armée libanaise à l’époque du commandement de Michel Aoun (1989), ex-ministre de l’Intérieur et ex-député du Parlement à l’époque de la Terreur syrienne au Liban (1992-2004). Il doit 39 000 $ à EDL. Bon, faut pas faire tout un plat BB, certains ont vraiment des fins de mois difficiles !
- On a aussi trois Khazen, dans les affaires comme on dit, dont un ex-député du Kesrouan. La famille doit 61 000 $ à EDL.
- La palme d’or de ce classement revient au docteur Faouzi Adaimi, docteur ye3né médecin. Le président du Syndicat des hôpitaux privés du Liban svp, et de l’hôpital Notre-Dame du Liban à Jounieh, doit à l’Electricité du Liban, à titre personnel et pour son hôpital, la coquète somme de 188 000 $, près du tiers des impayés. Sacré doc !

C’est sans doute le fait que son hôpital se situe à un jet de pierres de la pollution de l’usine électrique de Zouk qui l’a décidé à vivre au frais de la princesse, sur le plan électrique bien entendu. Décidément au Kesrouan, certains vivent bien de la largesse de l’Etat libanais. A moins de chercher l'explication dans un autre fait, la souveraineté libanaise ne s’exerce pleinement que dans certaines zones du territoire libanais justement, Kesrouan entre autres ! Pour rappel, puisqu'on est dans l'électricité, « le taux de vol du courant électrique par région (factures non payées et consommation non facturée) varie entre 12 et 69 % selon les régions: Beyrouth 12,1% – Mont Liban Nord 40,1% - Békaa Sud 45,6% - Mont Liban Sud 49,6% - Liban Sud 56% - Liban Nord 60,7% - Békaa Nord 67,2% - Békaa Centre 69,1%. » Cela va sans dire, dans cette étude, la banlieue de Beyrouth est inclue dans la région du Mont-Liban. Extrait de mon article 32, publié il y a 4 ans, jour pour jour, enfin presque ! Dernière précision, ces violations ne sont pas commises par des personnalités politiques, mais tout simplement par les citoyens libanais, qui n'ont pas tous des fins de mois difficile, loin de là. Wou balad !


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