dimanche 31 mai 2020

Une énième histoire nous rappelle que la législation libanaise concernant les travailleurs domestiques étrangers au Liban est complètement archaïque (Art.791)


La page et le site « This is Lebanon* » (voir PS), ont été créés il y a 3 ans. Ils sont consacrés aux abus dont sont victimes les travailleurs étrangers au Liban, notamment les domestiques. Dieu sait à quel point on peut en baver dans notre pays, que l’on soit étranger, autochtone libanais, oiseau migrateur, animal sauvage, chien errant, chat de gouttière, arbre de trottoir, pierre de taille ou même paysage reculé.

Selon le poste datant du 30 mai, une dénommée Maria Luz Villaneuva, ressortissante des Philippines, ayant servi au Liban pendant 14 ans, dont une partie chez le couple Sabah Joumblatt et Michèle Sabbagha Joumblatt, aurait été battue vers la fin de l’année 2019 par ses employeurs, avant d’être jetée en prison plusieurs mois et renvoyée dans son pays en février 2020, sans un sou en poche.

Selon la victime qui apparait dans une vidéo qui aurait été enregistrée aux Philippines, les Joumblatt lui devaient 25 000 $ d’arriérés de salaire, alors qu’ils détiendraient des résidences à Beyrouth (Achrafieh, Koraïtim, Mar Elias), Baabdat, Saïda et Jounieh (un immeuble de 7 étages). Pour ne pas la payer, ils l’auraient accusé du vol d'un, puis de deux et même de trois manteaux luxueux, à 7 000 $ la pièce, lors d’un déménagement et l'auraient menacé de la jeter en prison. La victime aurait tenté de se jeter du balcon de l'appart, des travailleurs syriens l'auraient retenue. Lui, serait un rentier sans emploi, présenté comme un cousin de Walid Joumblatt, chef du Parti socialiste libanais. Elle, avocate, travaillant d’après la victime, pour le gouvernement libanais et Blom Bank.

Soyons clairs, je ne suis pas en mesure de vérifier la véracité de ce témoignage. Mais si l’histoire est vraie, elle est ignoble, elle fait froid dans le dos. Si l'histoire est fausse, la démarche est diffamatoire et infâme. Dans tous les cas de figure, le ministère public devrait se saisir de l'affaire afin de rendre la justice, personne ne devant être au-dessus de la loi au Liban. Il faudrait alors rendre à la victime, l'employée philippine ou le couple d'employeurs libanais, ses droits et sa dignité.

En attendant, une chose est sûre et certaine, cette énième histoire nous rappelle encore une fois que la législation libanaise, et même moyen-orientale arabe, concernant les travailleurs domestiques étrangers au Liban, mais aussi dans les pays du Golfe, est complètement archaïque. De l'aberrant principe du parrainage (كفالة pour faire venir une employée de maison de l'étranger) au fonctionnement des agences de recrutement chargées de l'offre et de la demande (les frais de dossier engagés ; le fait que n'étant pas libres de changer d'employeurs, les employées se retrouvent de facto prisonnières de ces derniers), en passant par les innombrables pratiques abusives (les conditions de logement ; les horaires de travail ; les congés et les vacances ; les contrôles administratifs ; etc.). De ce fait, cette législation doit être revue et corrigée en profondeur. Non seulement elle fait de nombreuses victimes parmi cette population vulnérable, comme en témoignent les nombreux faits divers rapportés régulièrement par les médias libanais, mais elle nuit gravement à la réputation du Liban et à l’honneur des honnêtes citoyens du pays du Cèdre.

L’histoire de Maria Luz Villaneuva a été partagée plus de 1 100 fois en moins de 48 heures, c'est pour dire que le narcissique chef du gouvernement libanais Hassann Diab devrait quitter son beau miroir un moment et se résigner à ne pas se teinter les cheveux la semaine prochaine, afin de prendre tout son temps pour se pencher d'urgence sur ce chantier législatif. Et avant que je n'oublie, la prochaine fois que sa femme implore les Libanais du haut sa tour d'ivoire du Grand Sérail d'accepter les petits boulots, de femmes de ménage et de domestiques, il faudra s'assurer auparavant que les gens aient des conditions de travail dignes et qu'ils soient payés à temps !

PS : Cela étant dit, la page « This is Lebanon » devrait envisager de changer de titre au plus vite, si ses auteurs veulent être pris plus au sérieux et ratisser large notamment au sein de la population libanaise, afin d'espérer changer les lois en vigueur et améliorer la protection des travailleurs domestiques étrangers au Liban. La bonne cause qu’elle défend, à laquelle nombreux Libanais adhèrent bien entendu, ne pourrait justifier ce titre clairement diffamatoire pour le pays du Cèdre et tous ses habitants. A moins que ça ne soit l'objectif ! C’est comme si on réduisait les Etats-Unis à l’affaire George Floyd et aux bavures policières raciales. Cela fait partie de l’Amérique, mais ce n’est pas l’Amérique. Les Etats-Unis resteront un grand pays, malgré leurs défauts. Idem pour le Liban, les abus font partie du Liban, mais ce n'est pas le Liban, nuance. Toute généralisation est par essence injuste, injustifié et stupide. « C’est cela aussi le Liban » conviendrait mieux.


vendredi 29 mai 2020

Affaire George Floyd, la énième bavure policière visant un Noir aux Etats-Unis : la nécessité de mettre un terme au sentiment de toute puissance du policier américain blanc (Art.790)


🇺🇸 Des homicides odieux se produisent quotidiennement aux quatre coins du monde. Des bavures policières abjectes surviennent régulièrement, pas seulement aux États-Unis. La mort de George Floyd est un homicide odieux et une bavure policière abjecte. C’est ignoble mais le scandale est ailleurs.

Ce qui révolte dans la mort de cet Américain noir par des policiers blancs le 25 mai, c’est un faisceau de trois éléments:

- Primo, l’attitude et le geste ahurissants des quatre policiers blancs, notamment de celui qui a donné la mort. George Floyd est soupçonné d’avoir utilisé un faux billet de 20$. Il est arrêté, puis plaqué par terre sur le ventre et menotté dans le dos. Il n’a montré aucun signe de résistance à son arrestation. Et pourtant, son meurtrier va poser son genou sur son cou. Alors qu’il va répéter à plusieurs reprises « je ne peux pas respirer » et que des témoins de la scène alertent les flics sur l’état de la victime, les trois policiers complices ne branchent pas et le policier-meurtrier maintiendra son genou sur le cou, pendant sept interminables minutes !, tout en exhortant la victime de se calmer.

- Secundo, les sentiments de toute puissance et de racisme qu’on retrouve chez certains policiers américains blancs. Le meurtre de George Floyd rappelle tant d’autres, notamment celui d’Éric Garner, un Afro-Américain du même âge tué à New York en 2014. Ça s’est passé à peu de choses près de la même façon : le motif de l'arrestation est sans gravité (il est soupçonné de vente illégale de cigarettes), l’étranglement pour assurer l'immobilisation, la scène est filmée par des témoins et la victime de l’époque ne cessera de crier elle-aussi « je ne peux plus respirer », en vain.

- Tertio, une certaine impunité des policiers blancs aux États-Unis. Derek Chauvin, le policier-tueur qui a causé la mort de George Floyd, fait l’objet de 18 plaintes en 20 ans de carrière, il est même impliqué dans trois interpellations mortelles (2006, 2008 et 2011). Pour beaucoup moins que ça, on est viré de son job sans sommation aux États-Unis. Le policier-tueur d’Éric Garner en 2014 n’a été limogé par le NYPD que cinq ans plus tard (2019) et il n’a fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire. Certes, les quatre flics impliqués dans le meurtre de lundi ont été viré de la police. Mais il a fallu trois jours de protestations et d'émeutes à Minneapolis pour qu'au cinquième jour après le crime, le tueur soit arrêté et inculpé d'homicide involontaire. Et encore, nous sommes loin de la condamnation et rien ne garantira qu'il écopera d'une peine proportionnelle au crime qu'il a commis. Rajouter à cela que les policiers complices du meurtre sont toujours libres et ne sont pas inquiétés pour l'instant.

Cette nouvelle affaire nous rappelle non seulement que la vie est sacrée, mais aussi qu'il est grand temps de mettre un terme au sentiment de toute puissance du policier américain, surtout s'il est blanc de peau.

#BlackLivesMatter
#BlueLivesMatter
#AllLivesMatter
Et même, #PalestinianLivesMatter , tiens 🤔


Réflexion de confinement : s’interroger sur l’influence de certaines activités humaines sur la qualité de vie ! Cas Disneyland Paris (Art.789)


Plus de 15 millions de visiteurs par an pour le divertissement, 42 000 par jour en moyenne, et 16 500 employés à l’œuvre, pour faire tourner la machine économique. C’était une ville à part entière avec ses lieux de divertissement, sa gare, ses hôtels, ses restaurants, ses boutiques, ses cinémas. Et pourtant, malgré le déconfinement du 11 mai, il n’y avait personne en cette belle fin de journée printanière, hier, sur les 22,5 km2 du domaine de « Disneyland Paris ». Wala doumaré, quelques chats faisant la sieste et des oiseaux qui s’en donnaient à cœur joie. Le calme régnait sur cette contrée du pays d’entre les deux fleuves, la Seine-et-Marne. Fermés depuis le 14 mars 2020, à cause de la pandémie de Covid-19, les deux parcs d’attraction n’ouvriront pas avant le 22 juin, au minimum.

L’ambiance est inquiétante pour certains, apaisante pour d’autres, surréaliste pour tous. La reprise progressive des activités économiques en France, au Liban et partout dans le monde, s’accompagne d’une augmentation de l’agitation humaine et d’une hausse générale du niveau acoustique dans les villes. Les voitures, les motos, les embouteillages, les marteaux-piqueurs, les interminables chantiers, les couloirs aériens, les afflux touristiques, les pompes à eau, les karchers, les aspirateurs, les taille-haies, les tondeuses, et j’en passe et des meilleurs, la liste des bruits parasites qui nous pourrissent la vie est bien longue, hélas.

Malgré le drame humain et économique de la pandémie, le confinement nous a donné une chance inouïe de ralentir notre rythme de vie et de baisser les décibels générés par nos activités individuelles et collectives. Il nous a donné la chance inouïe de déguster un autre mode de vie, mais aussi de consacrer plus de temps à la réflexion. Double raison pour aller jusqu’au bout ! Aujourd’hui, on ne peut que s’interroger sur l’influence de certaines activités humaines sur la qualité de vie. On doit le faire. Nom de Dieu, ne pouvons-nous pas vivre et travailler, se divertir et prospérer, aller et venir, en « mode silencieux », enfin, en générant moins de bruit, comme les hiboux* par exemple ? Ça serait chouette* quand même ☺️

* Contrairement aux autres oiseaux, le vol de ces rapaces nocturnes ne génère aucun bruit ! Zéro décibel. Il est d’une élégance incroyable. Ces animaux sont des merveilles de la nature pour un tas de raisons. Et ce n’est pas par hasard, que cette dernière était le symbole de l’Athènes antique.


jeudi 21 mai 2020

Un imposteur nommé Walid Joumblatt : « L'Occident ne peut que revenir à ses origines coloniales » (Art.788)


Deux tweets le même jour, l'un en français, l'autre en arabe, c'est que le beik veut faire passer un message important. Patience, j'y reviendrai, commençons par le personnage. Walid Joumblatt a réussi à tromper son monde. Hariri, père et fils, malgré les couacs. Berri, en temps de paix et de guerre, à part quelques escarmouches. Geagea et Gemayel, récemment mais il n’y avait rien de durable. Aoun et Bassil, ponctuellement. Avec Nasrallah le rapport de force est inversé, c'est la carotte et le bâton, très efficace. Le chef druze est insaisissable. Comme un poisson, vous avez l’impression de l’attraper, et hop, il vous file entre les mains.

A l’étranger, il a séduit beaucoup de monde aussi, des néo-orientalistes. Pas spécialement de son club, l’Internationale socialiste. Il y a eu bien sûr les deux François et présidents de la République française, Mitterrand et Hollande. Ce dernier l’a reçu un jour de juillet 2015, pour faire la connaissance de l’héritier du trône de Moukhtara svp, Teymour. Oh, à force d’être invité à Paris, le beik connait l’Elysée comme sa poche. Dieu merci, Macron n’est pas tombé dans le piège ! Dans le filet, on y trouve même Marion, la benjamine des Le Pen, une dynastie de l’extrême droite française, qui a rendu visite au beik mais pas au hakim, en octobre 2019, soit dit au passage.

Il faut dire que le chef du Parti socialiste progressiste libanais a quelque chose de séduisant. Pas au niveau politique voyons ! Ce seigneur féodal, affairiste avéré, est aussi socialiste que je suis bolsonariste. Pas au niveau des principes non plus. Le fils de Kamal a commencé sa carrière en 1977 en s’alliant avec l’assassin de son père, Hafèz el-Assad, pour combattre la « droite chrétienne ». Une vassalité poursuivie avec le fils, le tyran de Damas, Bachar el-Assad, de 2000 jusqu’en 2005. Oh, la rupture n’a pas duré longtemps. En 2010, il était de nouveau à Damas. Et pas qu’une fois, mais plusieurs fois, même après le déclenchement de la révolte syrienne. Il aidera le Hezb à virer Saad Hariri en 2011, comme le souhaitait l’axe Téhéran-Damas. La réconciliation avec la Syrie, a duré un temps. Belote et rebelote. Vous avez déjà le vertige ? Normal, « la girouette » est le surnom de Walid beik.

*

Ce qui séduit chez Walid Joumblatt, c’est plutôt son originalité et sa culture. Sauf que d’après l’écrivaine Françoise Sagan « la culture, c'est comme la confiture, moins on en a, plus on l'étale ». Ce n’est pas que le beik n’en ait pas, mais il en fait mauvais usage. La preuve, lundi.

A peine réveillé, il balance deux tweets sur la pandémie de Covid-19. L’un en français et l’autre en arabe. Ils sont censés dire à peu près la même chose, sauf qu’il y a une grande nuance entre les deux.
- A son public francophone, Walid Joumblatt dit : « L’histoire se répète dans les moments de grandes crises. Trump avant le coronavirus s’était lancé dans une guerre commerciale contre la Chine. Aujourd’hui c’est l’accusation de la Chine d’avoir provoquer le virus. Sommes-nous devant une nouvelle guerre d’opium? »
- A son public arabophone, il avait ajouté un détail : « L'Occident ne peut que revenir à ses origines coloniales. Aujourd'hui, nous assistons à une guerre froide à haut risque de la part de l'Occident qui exige de la Chine une indemnisation colossale sous prétexte qu'elle est responsable de la propagation de la pandémie de Coronavirus. L'Occident ne veut la Chine qu’un marché pour lui. Souvenez-vous des guerres de l'opium au XIXe siècle et l'occupation de la Chine afin de commercialiser l'opium. »

Vous avez noté la nuance et le détail entre l’arabe et le français ? J’y reviendrai plus loin. La guerre de l’opium désigne un conflit commercial survenu de 1839 à 1842 entre le Royaume-Uni, qui avait le monopole de la vente de l’opium dans l’Empire du Milieu (depuis 1773 déjà !), et la dynastie Qing qui régna sur la Chine de 1683 à 1912, qui s’y opposait. Elle a connu un deuxième round (1856-1860), au cours duquel la France et les Etats-Unis sont venus prêter main-forte au Royaume-Uni. Les deux guerres se sont soldées par la défaite de la Chine. Qu'en est-il aujourd'hui ? Eh bien disons que 170 ans plus tard, c’est exactement l’inverse qui se produit. C’est la Chine qui exerce une hégémonie économique sur le monde. La pandémie de Coronavirus a montré l’effroyable dépendance de ce dernier à l'égard de ce géant d'Asie. Il n’y a qu’à voir les bilans commerciaux. Le déficit commercial des Etats-Unis face à la Chine n’a cessé de grossir au fil du temps. Il est passé de 200 milliards $ en 2005 à 419 milliards $ en 2018. C’est la raison de la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump, à juste titre. Avec l’Union européenne, même topo, plus de 200 milliards $/an de déficit. Ainsi, la réflexion de Walid Joumblatt est le moins qu’on puisse dire à côté de la plaque.

*

Mais le plus grave ce sont les propos diffamatoires de Walid Joumblatt à l’égard des pays occidentaux. « L'Occident ne peut que revenir à ses origines coloniales. » Oh le chef du PS est un habitué des réflexions méprisantes, comme avec la communauté maronite du Liban en 2008 par exemple, qui a été qualifiée de « mauvaise graine » à huis clos. Le beik commet la stupide erreur de réduire la glorieuse histoire de l’Occident à la parenthèse coloniale. Son mépris ne permet pas d’expliquer pourquoi tant d’ex-colonisés ne pensent qu’à immigrer chez leur ex-colonisateurs, et pas en Chine, dans les pays arabes ou en Afrique. Il prouve qu’au fond, l’âge ne lui donne pas de la sagesse et n’atténue pas sa rancune de jeunesse. N’en déplaise au beik, l’Occident reste un havre de paix, de sécurité, de prospérité, de démocratie, d'égalité, de fraternité, et surtout, de liberté. Il ne l’a pas toujours été. Mais aujourd’hui, il fait si bon d’y vivre.

La réflexion de Walid Joumblatt est abjecte pour trois raisons.

. Primo, à cause de son timing. Au moment où le gouvernement libanais cherche désespérément à obtenir le soutien financier des pays occidentaux, une douzaine de milliards $ quand même, pour sauver le Liban de l’effondrement général dû à l'incompétence et la corruption de sa classe politique, Walid Joumblatt en tête, le beik a raté une bonne occasion de la fermer.

. Secundo, à cause de la charge haineuse qu'elle contient. D'après le beik, « l'Occident ne peut que revenir » à cela, c'est inéluctable, il est donc condamné à être « colonial » ad vitam aeternam. Les naïfs occidentaux sauront désormais à qui ils ont affaire, un hypocrite qui fait semblant d'être ouvert à l'Occident.

. Tertio, à cause du positionnement politique qu'elle reflète. Libre au leader socialiste libanais de défendre le Parti communiste chinois, mais il ne peut pas nier à moins de jouer à l’autruche, qu’une écrasante majorité des pays du monde soutient l’initiative australo-européenne pour mener une « enquête indépendante » sur la gestion de l'épidémie par l’OMS, et indirectement par la Chine.

Et pour cause, le régime totalitaire en Chine a trompé le monde sur l’ampleur et la dangerosité de la nouvelle maladie. Même l’Iran l’a reconnu ! Par son incompétence il a transformé l’épidémie en une pandémie aux conséquences désastreuses sur les plans humains et économiques, et dont on n’a pas fini d’en payer le prix. Il est donc normal de lui demander des comptes. Si le beik a eu la chance d’échapper au questionnement et au jugement en 43 ans d’une carrière milicienne et politique truffée de fautes et de trahisons, l’imposteur doit comprendre que ce n’est pas la règle en Occident 🤫


samedi 16 mai 2020

Le Liban demande la confiance et un financement de la communauté internationale, alors qu'il n'est toujours pas décidé à contrôler sa frontière avec la Syrie (Art.787)


« Aide-toi, le Ciel t’aidera », conclut La Fontaine une de ses fables, Le Chartier embourbé. Eh non, ça ne vient pas de la Bible. Le Liban est également embourbé, sauf que ses chartiers ne s’aident pas, mais espèrent naïvement que le Ciel les aidera.

Après des mois de tergiversations, le gouvernement de Hassann Diab s’est décidé enfin à demander l’aide du FMI. Pour ce faire, il a présenté un plan de réformes. La propagande officielle voudrait nous faire croire qu’il est « historique ». Et comment ! Officiellement le dollar américain passera à 4 300 LL. Qui avait 100 $ sur son compte dans la monnaie nationale, n’aura plus que 33 $ sur son relevé. نعيماً pour le haircut.

En contrepartie, le pays du Cèdre espère obtenir des aides financières conséquentes pour redémarrer la machine. Une dizaine de milliards de dollars, rien que ça. En pleine récession au niveau mondial où le surendettement menace les potentiels donateurs, les pays arabes et occidentaux, certains compatriotes ont espéré que le pouvoir en place, le quintette Aoun-Bassil-Diab-Berri-Nasrallah, aura l’intelligence de se montrer bon élève. Que de naïveté !

*

Au commencement du nouveau chapitre de l’histoire, il y a le scandale du trafic d’hydrocarbures et de farine vers la Syrie, des produits achetés en devise étrangère, le dollar, et dont le prix de vente est soutenu par la Banque du Liban. Scandale à triple dimension, le dossier est accablant. Jusqu’où remontera l’enquête, si enquête il y aura ? Nulle part. Et pourquoi ? A cause de « l’anomalie » que constitue la situation du Hezbollah au Liban.

Le scandale cache en réalité un problème de plus grande importance, celui des frontières grandes ouvertes entre le Liban et la Syrie. Ce fut déjà le cas tout au long de l’occupation du Liban par la Syrie, de 1976 à 2005. Beaucoup de compatriotes ont espéré un changement radical à la seconde indépendance. Mais c’est sans compter avec les deux camps politiques du Liban.

. D’une part, les pro-Assad. Ils sont légion. C’est la majorité d’aujourd’hui. C’est le camp du 8-Mars d’hier, celui qui s’est formé place Riad el-Solh derrière le slogan « Merci la Syrie des Assad », Nasrallah, el-Sayyed, Frangié et Berri notamment. A la formation originelle se sont joints en février 2006, Aoun et Bassil.

. D’autre part, les anti-Assad au Liban, le fameux camp du 14-Mars de la place des Martyrs, Hariri, Joumblatt et Geagea notamment, qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Il n’a jamais eu le courage d’avoir les moyens de ses ambitions. Il est mort de sa belle mort, en soutenant en 2016, deux figures importantes du camp adverse, les pro-Assad, Frangié et Aoun, pour la présidence de la République.

La situation s’est considérablement détériorée entre 2011 et 2014, lorsque le camp du 8-Mars, a pu accéder seul au pouvoir, grâce à la volte-face de la girouette de Mekhtara, W. beik. Le pouvoir, la coalition formée autour du président Sleimane et du Premier ministre Mikati (Nasrallah, Berri, Joumblatt, Frangié, Diab lui-même, Bassil, Aoun, etc.), a tout fait pour garder les frontières libano-syriennes grandes ouvertes à tous les trafics et dans les deux sens. Cette politique a eu trois conséquences nuisibles : l’implication du Hezbollah dans le bain de sang de la guerre civile syrienne ; l’afflux de millions de réfugiés et de déplacés syriens (moitié de la population libanaise, un casse-tête sans solution à moyen terme) ; l’installation des jihadistes syriens sur les versants ouest de l’Anti-Liban.

*

Belote et rebelote, les ex-8-Mars sont de retour en janvier 2020, seuls comme en 2011-2014, à cause des caprices de Hariri et des orientations à courte vue de Geagea-Joumblatt. Le pire est à craindre. Alors que le scandale du trafic fuel-farine exige le contrôle de la frontière syro-libanaise d’une main de fer, le gouvernement de Hassann Diab ne fera rien dans ce sens, parce qu’il est hezbollahi compatible et le hezb ne le souhaite pas.

Son chef l’a fait savoir officiellement jeudi. C’était à l’occasion de la commémoration de la mort de Moustafa Baddreddine en Syrie (2016). Le présumé cerveau de la cellule terroriste qui a organisé et exécuté le projet d’assassinat de l’ex-PM du Liban, Rafic Hariri, et de 21 autres personnes, poursuivi par un tribunal international dans ce meurtre odieux, a été qualifié avant-hier de « grand chef jihadiste, bien-aimé et cher frère ». Malgré cela, le gouvernement et la ministre de la Justice, sont restés aux abonnés absents. Et ça va demander une aide internationale !

. Le chef du Hezb a insisté sur « le rétablissement de relations de coopération normale entre le Liban et la Syrie, qui serait soi-disant dans l’intérêt du Liban plus que de la Syrie, et nous permettrait d’exporter nos produits vers l’Irak via la Syrie ». C’est comme si les règnes de la tyrannie des Assad père et fils, au Liban et en Syrie, ne sont entachés ni de terreur et ni d’horreurs.

. Il a affirmé que « le poids de la contrebande entre le Liban et la Syrie est surestimée et son contrôle impossible, il est au-dessus des moyens de l’armée libanaise ». Le dénigrement de l’institution militaire comme toujours, pour justifier la pérennité de l’anomalie de la milice du Hezb au Liban.

. Hassan Nasrallah a sous-entendu que « le passage des miliciens et des armes du Hezbollah par la frontière syro-libanaise est hors de débat ». La souveraineté libanaise reste donc privatisée jusqu’à nouvel ordre.

. Il a « refusé catégoriquement que le Liban demande la contribution de l’ONU pour l’aider à sécuriser la frontière syro-libanaise ». Non seulement l’ONU en serait incapable mais ça serait selon le chef du Hezbollah un des objectifs israéliens de la guerre de Juillet 2006 et cela affecterait la force de dissuasion qui protège le Liban face à Israël ». Mais voyons, c’est une telle force de dissuasion qu'en 2006, Israël a pu s'acharner sur le Liban pendant 33 jours (tuant 1500 personnes, déplaçant 750 000 personnes et occasionnant une douzaine de milliards $ de pertes et de dégâts); que depuis 2006, le chef du Hezb est obligé de préenregistrer ses discours dans un bunker et de ne pas dormir deux nuits de suite dans le même lit ; et que depuis 2011, Israël bombarde les bases du Hezb et de l’Iran en Syrie, quand et comme bon lui semble.

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Le contrôle de la frontière entre le Liban et la Syrie, on en parle depuis la nuit des temps. En vain. Les ex 8-Mars ne veulent pas en entendre parler et les ex 14-Mars n'ont jamais eu le courage d’avoir les moyens de leurs ambitions. Le timing du discours de Hassan Nasrallah ne doit rien au hasard. Il vise à saboter la démarche entreprise par le gouvernement libanais de Hassann Diab auprès du FMI, surtout après le succès du premier round des discussions pour obtenir la douzaine de milliards de dollars promis par la conférence CEDRE en 2018 à condition de faire des réformes. Le chef du Hezb veut rendre la route de Damas comme la seule voie de secours pour le Liban, pour nous placer au ban des nations avec la Syrie et l'Iran. Il veut aussi rendre Bachar el-Assad comme le grand sauveur du Liban, alors qu'il sera le fossoyeur du pays du Cèdre, il ne pense qu'à sa colonisation via les réfugiés syriens d'ailleurs. Le discours n’a suscité aucune réaction de la part des alliés du Hezbollah, Michel Aoun, Hassann Diab, Gebrane Bassil et Nabih Berri. Et dire qu'ils espèrent convaincre le FMI de leur faire confiance ! C’est méconnaitre et le FMI et les pays donateurs et cette fable de La Fontaine, « Aide-toi, le Ciel t’aidera ».


mardi 12 mai 2020

Première journée de déconfinement à Paris : récit, premières impressions et matière à réflexion sur la pandémie en France et au Liban (Art.786)


Première journée de déconfinement hier à Paris, première journée d’intervention. Récit, premières impressions et matière à réflexion, sur la pandémie en France 🇫🇷 et au Liban 🇱🇧

• C’est comme si tout n’était qu’un rêve. Ce qui est fabuleux et inquiétant chez les êtres humains sur Terre, c’est leur faculté d’ADAPTATION et d’OUBLI 🤔

• Les villes du monde ont toujours un AIR DE CAMPAGNE, on ne va pas s’en plaindre !

• La vie reprend progressivement, mais ici les rues sont moins fréquentées que d'habitude. On dirait que le monde entier est sur le MÊME FUSEAU HORAIRE, un DIMANCHE MATIN. L'ambiance dans les transports en commun parisiens, dans la photo le RER-B vers 14h30!, est digne d’un lendemain de réveillon, au moins sur mon trajet. A Paris comme à Beyrouth, il n'y a pas de doute, les populations se réveillent avec une gueule de bois.

• Le port du MASQUE dans la RUE ou dans les voitures, est observé par à peine 10% des personnes, un peu plus dans certaines zones. Dieu merci, la France reste un pays latin et le Liban un pays méditerranéen. Non à l'obligation d'en porter quelqu'en soient les circonstances. Il faut que ça soit justifié par un risque avéré.

• Le port du MASQUE obligatoire dans les TRANSPORTS en commun où le risque de contamination est élevé, est respecté par 95% des usagers, par civisme, égocentrisme et simplement pour éviter les 135 € d’amende, au choix ou les trois à la fois.

• Couleurs, formes, matières, les MASQUES sont plus LAIDS les uns que les autres. Vivement que les stylistes s'en mêlent surtout que la mode est appelée à durer ! L’horreur ce sont ceux en bec de canard, le masque-sopalin de la ville de Paris et le masque-serpillière de la ville de Lyon. Mais aussi tous les masques fixés derrière les oreilles, soit 99% d'entre eux. Pas de doute, il faut que je fabrique le mien. J’ai la forme, un prototype, comme une coque de chevalier du Moyen-Age, pas plissé, dégagé un peu sous les yeux, fixation par élastique derrière la tête, comme ceux des chirurgiens, pas les oreilles, avec peut-être des coussins pour éviter la formation de la buée sur les lunettes.

• Première COLÈRE de la journée, un constat, 95% des MASQUES portés sont JETABLES, en France comme au Liban et partout ailleurs. Ils sont là les milliers de millions de masques promis aux populations, essentiellement « Made in China ». Pathétique. La pandémie de Covid-19 ne peut pas être une occasion de gaspiller l’argent public et les ressources de la Terre, et pire encore, de recourir à des matières dérivées des énergies fossiles (pétrole, gaz et charbon), comme le polypropylène, le polystyrène, le polycarbonate, le polyéthylène et le polyester, pour fabriquer des masques chirurgicaux qui ne serviront que 4 heures et finiront au milieu des trottoirs, dans les décharges, incinérés ou sur le « 7e continent » (soupe de déchets plastique du Pacifique nord). Et comble de l’absurde, si on respecte les règles d’usage, ils coutent 4 fois plus cher (à raison de 2 usages/j, 36€/personne/mois contre 9€ si on les achète, voire 0€ si on les fait soi-même !). On est entre l’absurde, la bêtise incarnée et le grand scandale ! Oui c’est une faute impardonnable de tous les pouvoirs publics du monde. Mais pas uniquement. Ils m’étonnent tous ces gens en France, au Liban et ailleurs, confinés depuis des semaines et des mois et même pas fichus de consacrer une demi-heure pour coudre quelques protections rhino-pharyngées avec le tissu d’un vieux pantalon ou de draps, mais toujours prêts à râler et à critiquer les Etats et leur gestion des masques ! Tous coupables. Le masque chirurgical doit être réservé au personnel médical, aux personnes à risques et aux malades, point barre.

• Autre colère, les GANTS, très à la mode au Liban. Nom de Dieu, ça ne sert absolument à rien en dehors de l'hôpital et si on ne fait pas partie du personnel médical, à part à gaspiller les ressources de la Terre et l'argent public et privé. Le lavage des mains à l’eau et au savon est largement suffisant.

• Les frotteurs du métro sont en voie d’extinction il me semble, grâce à la distanciation sociale, sauf sur les lignes populaires, la 13 par exemple.

• Le sticker collé sur les sièges des rames parisiennes semble être une énigme pour certains. Une nette majorité d’usagers a compris qu’il désigne le siège à ne pas occuper pour respecter la distanciation sociale, mais une petite minorité croie exactement le contraire, qu’il s’agit du siège à occuper. Et pourtant le dessin est parlant et le message est clair, « Pour notre santé à tous, laissons ce siège libre ». Cela me rappelle un compatriote libanais qui croyait qu’il fallait centrer la voiture sur une des lignes de guidage de l’autoroute et non rouler entre les traits blancs.

• Première POIGNÉE DE MAINS, par réflexe, sauf que je ne me suis pas gêné pour aller aussitôt me laver les mains en balançant avec le sourire, « sans offense ».

• Pas de BISES, ni d'embrassades ni d'accolades pour l’instant, même si j’y tiens, pas à tout va, mais après une absence et une séparation. En tout cas, c’est trop tôt pour reprendre ces pratiques.

*

• Première DISCUSSION « live », enfin officielle disons, une occasion de concentrer deux mois de RÉFLEXIONS en quelques grandes lignes.

- La lourde responsabilité du régime communiste chinois d’avoir transformé l’épidémie en une pandémie est indiscutable.

- La certitude que nous n’aurions pas eu une pandémie si le virus était apparu à Paris, Berlin, Rome, Londres, Sydney ou New York, dans un pays démocratique occidental, est incontestable.

- La nécessité de diminuer la dépendance du monde de la Chine et de relocaliser certaines usines. A force de baisser les coûts et augmenter les profits, aujourd'hui, non seulement 60% du paracétamol consommé dans le monde est produit en Chine, mais comble de l'absurde, un régime communiste contrôle une grande partie de l’économie mondiale, alors que la première puissance économique, libérale et démocratique, les Etats-Unis, s'enfonce dans l'isolationnisme. C’est tout de même surréaliste !

- Le confinement général était incontournable, prétendre le contraire relève de l'hérésie, à moins d'accepter la surmortalité dans les populations, notamment un taux de mortalité prématurée élevé.

- Les comparaisons des statistiques des pays au sujet de la pandémie est ridicule, tellement les paramètres sont nombreux. Un exemple, Stockholm c'est 1 million d'habitants sur 200 km2, Paris c'est 2 millions d'habitants sur 100 km2, appliquer à Paris ce qu'on fait à Stockholm, c'est s'assurer d'avoir 4 fois plus de contaminations. Autre exemple, la France c'est près de 90 millions de touristes par an, l'Allemagne c'est moins de 39 millions, soit près 2,5 fois plus de risque potentiel de diffusion du virus pour l'Hexagone. A ce propos, ce n'est pas par hasard que les 4 pays les plus touristiques au monde, France/Espagne/Etats-Unis/Italie sont aussi les 4 pays les plus touchés par la pandémie de Covid-19. Rajoutez la démographie, la répartition de la population par tranches d'âge, la fréquentation des transports en commun, le mode de vie, la discipline, la fiabilité des chiffres, l'attachement aux libertés fondamentales, et j'en passe et des meilleurs, tout cela rend ce travail de comparaison complexe, pas simpliste.

- Les modèles sud-coréen, allemand, suédois et bien d'autres, relèvent de la mythologie. Je m'explique, une stratégie de lutte contre le Covid-19 qui n'est pas transposable d'un pays à un autre, n'est pas un modèle à suivre. Il y a autant de modèles que de pays, libanais compris.

- Jamais l'expression "Cool Raoul(t)" n'a été aussi juste, n'est-ce pas Didier ?

- Fermer les parcs et jardins et s'étonner des piques-niques et apéros organisés aux bords du Canal Saint-Martin à Paris après 7 semaines de confinement et par une belle journée printanière, relève de la bêtise. Avis au gouvernement français, au préfet de police et à la maire de Paris.

- Ne pas voter le plan d’aides de 1 200 milliards LL aux Libanais en difficulté le 22 avril et s'étonner que le peuple qui subit une triple crise économique, sociale et sanitaire descend dans la rue pour crier sa colère, relève de la stupidité. Avis au gouvernement, aux députés et aux leaders libanais.

- Au niveau des pays comme au sein de chaque population, soit on s’en sort tous ensemble, soit personne ne s’en sortira vraiment, le non-respect des lois par toutes et tous n’est pas une question d’opinion, mais d’amende.

- Etant donné la diffusion large de nouveau Coronavirus dans les sociétés, le retour à la normale ne se fera pas avant le milieu de l’année 2021, par éradication du SARS-CoV-2 grâce aux mesures sociales et par immunisation naturelle de 66% des populations, voire par vaccination, ce qui n’est pas à l’ordre du jour. Plutôt on le comprendra, mieux on résistera.

- En attendant, nous devons redémarrer la machine économique nationale et mondiale, tout en adoptant une « économie de guerre ». Plutôt on le comprendra, mieux on s’en sortira.

- Afin d’éviter de nouveaux pics d’infections et d’hospitalisations, et de surcharger le personnel médical, nous devons perdurer le télétravail, le téléachat, l’automatisation, les gestes barrières, la distanciation sociale, le sens civique, la solidarité, etc.

- Il faudrait sans doute développer de nouvelles pratiques sociales, provisoirement, comme le port du masque dans les magasins/cinémas/hôtels/lieux de culte/avions ; le port de visière dans les restaurants/cafés/pubs/musées/expos/trains, etc.

*

• S’il faut résumer notre nouveau MODE DE VIE en une comparaison, disons que le « masque » dans la pandémie de SARS-CoV-2 sera l’équivalent du « préservatif » dans la pandémie du VIH et le « confinement » vaut et vaudra une « abstinence », avec une triple nuance, le coronavirus est l'affaire de toutes et de tous, il est moins meurtrier et il sera moins durable. Si nous devons faire qu'un seul reproche aux gouvernants politiques en France comme au Liban et ailleurs dans le monde, au corps médical, aux médias, et surtout à l'OMS, ça sera celui portant sur le cafouillage au sujet de l'importance du PORT DU MASQUE dans la lutte contre le Covid-19. C'est un raté monumental. Oui il fallait réserver les masques aux professionnels de santé, mais il fallait dire aussi, depuis le 31 décembre 2019, mettez ce que vous voulez sur le nez et la bouche -un foulard, un col roulé, un masque de nuit, le soutien gorge de votre dulcinée ou le slip à bosse de votre prince charmant- mais couvrez les sources de contamination et les portes d'entrée du nouveau virus (le nez et la bouche par un tissu, et les yeux par des lunettes), si la distanciation individuelle ne peut pas être respectée !

• Fin de journée avec encore une POIGNÉE DE MAINS, cette fois par conviction, j’y tiens. C’est l’invention immatérielle la plus fabuleuse de l’histoire de l’humanité. Difficile de m’en passer ! Cela étant dit, je ne me suis pas gêné pour me frotter aussitôt les mains avec du gel hydroalcoolique tout en balançant, « rien de perso, hein ! » 😊


samedi 2 mai 2020

Du tchat de Saad Hariri avec les journalistes, il ressort beaucoup de malveillance sur Gebrane Bassil et de la bienveillance sur Nabih Berri (Art.785)


Qui suit les déclarations de Saad Hariri depuis cinq ans jusqu’à hier, ne peut qu’être étonné parfois par la ligne politique de l'ex-Premier ministre libanais.

En 2015, le chef du Courant du Futur a tenu en coulisse puis en public, à commercialiser la candidature de Sleiman Frangié à la présidence de la République. Proposer celui qui considère Bachar el-Assad comme « son frère » et Hassan Nasrallah comme le « maître de tous », pour aller jurer devant Dieu de « protéger la Constitution libanaise », constituait une grave erreur politique, surtout de la part du fils de Rafic Hariri. On connait la suite. La gageure a précipité Samir Geagea dans les bras de Michel Aoun, une lourde faute politique aux conséquences désastreuses ! Depuis, rien ne va plus entre tout ce beau monde, ni entre les ex-piliers du 14-Mars ni entre les ex-ennemis réconciliés.

Au cours de ses innombrables points de presse, cheikh Saad adopte au sujet de son ex-allié du 14-Mars, une des deux attitudes. Parfois, c’est comme si le chef du parti des Forces libanaises n’existe pas. Ce fut le cas il y a quelques jours, lors de la « دردشة » avec les journalistes. Disons c’est justifié. D’autre fois, c’est comme si el-hakim est le cœur du problème. Ce fut le cas par exemple lors de la désignation du nouveau Premier ministre Hassann Diab, après la démission de Saad Hariri le 29 octobre 2019. Ce dernier a pardonné à tout le monde de ne pas l’avoir reconduit, sauf à Samir Geagea. C’est injustifiable surtout que le blocage pour cette reconduction venait de son caprice politique, qu’on peut résumer ainsi : moi, homme politique ayant gouverné et contrôlé les gouvernements pendant 11 des 14 dernières années de 2005 à 2019, accepte d’être de nouveau Premier ministre, mais je ne veux aucun politicien dans mon prochain cabinet ! Une façon rusée et malhabile de tenter de récupérer la rue protestataire qui réclamait plutôt un gouvernement technocrate de la tête au pied.

Passons sur les joutes verbales régulières qui opposent Saad Hariri à Gebran Bassil depuis un moment. De « صدقي » pour lequel les électeurs du Futur devaient voter lors des élections législatives de 2018, نكاية بالحكيم, à « فشر على رقبتك » hier, نكاية بالجنرال. Bon, disons que GebB peut se montrer très lourd. Il est parfois, même souvent, une tête à claques, surtout quand « Monsieur Fiasco », surnom décerné et hautement mérité pour sa gestion désastreuse du secteur électrique (qui laisse un trou cumulé de 45 milliards $, la moitié de la dette publique du Liban), se prend pour « Don Quichotte de la République libanaise », comme il se voit tous les matins devant le miroir de sa salle de bain, et prétend lutter contre la corruption et le gaspillage de l'argent public.

Ce qui attire l’attention dans les fraiches déclarations de Saad Hariri, ce sont deux points précis.

. D’une part, toute cette malveillance concentrée sur Gebrane Bassil, justifiée en partie, mais pas jusqu'au point de l'accuser de tous les maux, « raciste » compris. A écouter et à lire cheikh Saad, GebB est le manitou au Liban. Pire encore, on dirait que Hariri fils n’accorde au Hezbollah et son chef que le rôle de comparses et la faute de « couvrir Gebran Bassil et ses agissements ». On croit rêver.

. D’autre part, toute la bienveillance politique déployée à l’égard de Nabih Berri. A ce point, c’est hallucinant. Le chef du Parlement a humilié le chef du gouvernement de la pire manière il y a un peu plus d'une semaine (« ni toi ni personne ne me dira ce que je dois faire ! », avec en bonus, cela 🤪 ou un truc de ce genre, à ce qu'on raconte, et une leçon de morale quelques jours plus tard, « il faut apprendre à présenter les projets de loi », càd toujours commencer en coulisse pour peaufiner et conclure les deals politiciens entre les fromagistes, avant d'aller à la mascarade du vote protocolaire !). C'est une première dans l’histoire de la République libanaise. Un couac qui théoriquement ne passe pas مرور الكرام au pays des 18 communautés. Et pourtant, Saad Hariri n’avait rien à redire à ce sujet hier, chez lui, à Beit el-Wasatt à Beyrouth, durant le tchat avec les journalistes. Pire encore, il a tenu à féliciter ألاستاذ qui « joue un très grand rôle au Liban (…) il a la sagesse, il sait comment se conduire avec les gens et dire ce qu’il faut quand c'est nécessaire ». Saad Hariri sait de quoi il parle, il a suffi un clin d’œil de Nabih Berri pour faire sauter le quorum parlementaire le 22 avril, avec l’aide des députés du Futur et du PS svp, et renvoyer le vote du plan d’aides de 1 200 milliards LL aux calendes grecques. La synchronisation et l'harmonisation était impressionnante.

Parlons peu, parlons bien. Je l'ai dit et redit, je persiste et signe, Saad Hariri ferait mieux pour le Liban que le hezbollahi-compatible gouvernement de Hassann Diab. Néanmoins, les conseillers de l'ex-Premier ministre libanais doivent bien comprendre et attirer l'attention de Saad Hariri sur trois points.

- Primo, la diabolisation excessive de Gebrane Bassil, pas de Nabih Berri, et l'ignorance manifeste de Samir Geagea, pas de Walid Joumblatt, ne peut qu'être mal perçu par la rue chrétienne.

- Secundo, cette politique de l’autruche et du compromis, تدوير الزوايا وتبويس اللحية, qu’il pratique comme tout le monde au pays du Cèdre, sans exception aucune, est responsable de la détérioration constante de la situation au Liban.

- Tertio, avec tout le soutien du FMI, les Libanais ne connaitront ni paix ni prospérité que si et seulement si les politiciens libanais, notamment les ex-piliers du 14-Mars, Hariri et Geagea, ainsi que les personnalités indépendantes et la société civile, travaillent sérieusement pour mettre un terme à « l’anomalie » que constitue la situation du Hezbollah au Liban, une organisation classée terroriste par les pays arabes et occidentaux ainsi que par l'Union européenne et les Etats-Unis, d'où viendra l'argent du FMI. CQFD et à bon entendeur, salut 🤔

PS : Quelques heures avant le tchat de cheikh Saad avec les journalistes hier, le monde apprend du ministre fédéral allemand de l'Intérieur que « l'Allemagne a interdit aujourd'hui les activités de l'organisation terroriste chiite du Hezbollah sur son territoire ». De l'autre côté de la Méditerranée, on continue la politique de l’autruche et du compromis.


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