Et dire qu'on se fait encore avoir. On a cru en toute bonté que tous les enfants de la patrie seraient à la hauteur. Déjà pour l’enterrement, certains ne le sont pas !
Après un modeste hommage que j'ai rendu à ce grand homme de notre pays, Nasrallah Sfeir, et la multitude de témoignages authentiques de votre côté chers lectrices et lecteurs, exprimés sur mon mur, sur le vôtre et ailleurs, je pensais disposer de quelques jours off-line. Une aimable personne a fait preuve de générosité en comparant mon encensement lyrique aux oraisons funèbres de Bossuet, ce prédicateur français maitre incontesté de l'éloquence et de cet art oratoire, auteur d'une figure de style restée dans la littérature, « Madame se meurt ! Madame est morte ! », prononcée à la basilique Saint-Denis en 1670 lors des funérailles d'Henriette d'Angleterre, épouse de son cousin Philippe d'Orléans, frère de Louis XIV, morte à l'âge de 26 ans.
Ce 15 mai de l’an de grâce 2019 aurait dû être un jour historique, de deuil, de recueillement et de réflexion. La dépouille du défunt devait quitter l'hôpital Hôtel-Dieu de Beyrouth pour Bkerké, le siège du patriarcat maronite d'Antioche et de tout l'Orient. Les obsèques sont prévues pour jeudi 17h. On attend près de 50 000 citoyens de toutes les confessions, chrétiennes et msulmanes. Sur le plan officiel, seront présents, le président de la République libanaise, Michel Aoun, le Premier ministre, Saad Hariri et le chef du Parlement, Nabih Berri, ainsi que le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et des représentants du Vatican, du Qatar et d'Arabie saoudite. Tous les partis politiques libanais viendront rendre un dernier hommage à Nasrallah Sfeir -avec une participation spéciale pour le parti des Forces libanaises (à dominante chrétienne) et le Parti socialiste progressiste (à dominante druze), étant donné le rôle déterminant joué par le défunt dans la réconciliation de la Montage- à l'exception du Hezbollah.
Celles et ceux qui sont touchés par le départ du patriarche maronite étaient censés s'isoler du monde extérieur ou descendre dans la rue, faire silence ou méditer, se tourner vers eux-mêmes ou vers Dieu pour prier. Comme un bon nombre d'entre vous, j'ai eu l'idée de suivre le "direct" sur l'événement via internet, faute de pouvoir y participer. Avouez, bien mal nous en a pris.
Je fus d'emblée quelque peu contrarié par la présence massive des drapeaux du parti des Forces libanaises. Soyons clairs, chacun est libre d'exprimer ses émotions par rapport au décès du patriarche maronite de la manière qu'il juge la plus appropriée. Je comprends parfaitement le pourquoi du comment de la chose. Mais enfin, pourquoi s'approprier un symbole national qui permet de ratisser large, au-delà de la communauté maronite et du parti des FL? Que personne ne soit vexé, il y avait une raison à s'interdire cela et celle-ci est simple. Les justifications de ce qui s'est passé sont certainement valides, mais une telle appropriation réduit et rapetisse ce grand homme trans-communautaire et trans-partisan. Un ou deux drapeaux du parti ici et là, aurait été suffisant pour faire passer le message. Par contre, imposer les drapeaux FL en masse au point d’engloutir le drapeau du Liban, à supposer que c'était spontané, était le moins qu'on puisse dire, inconvenant. Bon, il y a plus grave.
Justement, ensuite, je fus agacé par les pétards et les youyous qu’on a entendu dans le background à un certain moment, notamment à l'arrivée du cercueil à Bkerké. Ça alors, mais depuis quand elferqaï3 wel tzoulghout accompagnent le cercueil d'un patriarche ? On m’a déjà rapporté une vidéo sur cette mode populaire contemporaine surréaliste, minoritaire, Dieu merci. J’ai projeté en parler, mais l’actualité a relégué le sujet aux calendes grecques. Non mais depuis quand cette hérésie fait partie de la culture funèbre libanaise pour un homme âgé de 99 ans ? Dans le contexte d’un enterrement, les pétards et les youyous n’ont pas leur place, il dénature la cérémonie et l'ambiance. J’ai enterré père et mère il y a bien des années. Je me souviens encore comme si c’était hier. Le moment le plus émouvant pour moi c’était l’accueil des cercueils dans la tristesse, les pleurs, la prière et les magnifiques chants religieux maronites et syriaques, et au rythme des cloches qui sonnaient le glas et de rien d’autre. Les pétards et les youyous dans un enterrement constituent un acte déplacé en général et un manque de respect flagrant dans le cas particulier de Mar Nasrallah Boutros Sfeir. Oh mais il y avait beaucoup plus grave que tout cela!
A ce propos, enfin, je vous demande deux secondes pour bien choisir mes mots. Je fus, et pas le seul, irrité et indigné, énervé et exaspéré, mis en colère et fou de rage, à la vue de ce cercueil tarabiscoté, une horreur artistique. Rudy Rahmé est peut-être un sculpteur créatif et très doué à ses heures perdues. Mais une chose est sûre, son œuvre est d’une laideur indescriptible. Il a beau mettre du bois de cèdre de la région des Arz, du bois d’olivier de la Vallée de Qannoubine, de la roche du Kesrouan, son cercueil reste hideux. Non mais franchement depuis quand on recourt à trois matériaux pour créer un cercueil ? Et encore, il y a le plâtre d'une tête moulée ou sculptée à la hâte, disproportionnée par rapport au reste ! Et ce n’est pas tout, si vous regardez bien, vous verrez même l’époxy et l’enduit pour combler les vides. Rudy Rahmé s’est fait plaisir à la manière d’un artiste ayant une imagination sans inspiration, incapable de penser une seconde à qui est destinée son œuvre. Désolé, ce cercueil est raté et totalement indigne de cette dernière grande personnalité à entrer dans le Panthéon libanais, Mar Nasrallah Boutros Sfeir.
La question est maintenant de savoir qui a donné le feu vert pour une telle horreur artistique ? Je pense comme vous ! Eh oui, ce n’est pas par hasard si j’ai fait allusion à lui dans mon hommage dimanche dernier. C’est sans l’ombre d’un doute la signature de quelqu’un qui se regarde dans le miroir tous les matins et se teint les cheveux tous les mois. Vous parlez d’un déclin et du dernier des Mohicans ! Que ça reste entre nous, j’ai proposé à Tom Cruise une mission impossible à réaliser en 24 heures, remplacer cette laideur abjecte par une simple copie du simple cercueil du simple pape Jean-Paul II, mort en 2005 et canonisé depuis, voir photo ci-jointe. A tout hasard, le cercueil que certains fidèles de mauvais goût ont choisi pour le patriarche Nasrallah Sfeir est à gauche et celui de saint Jean-Paul II à droite. La beauté est dans la simplicité car « la simplicité est la sophistication suprême », à en croire Léonard de Vinci. S’il est donné au patriarche maronite de dire un dernier mot, il s’adresserait à Rudy Rahmé avec un sourire narquois et la rime : ton cercueil est hideux et étroit, tellement pompeux que tu peux le garder pour toi 😊
Post-scriptum 🤔
Aux dernières nouvelles, Tom Cruise a réussi sa mission, le cercueil du sculpteur Rudy Rahmé sera bel et bien remplacé pour la cérémonie d'hommage national. Minute ! ne nous réjouissons pas trop vite. Il ne le sera pas parce qu’il est laid, pompeux et indigne du défunt. Comment vous l’annoncez ? Euh, désolé, mais ils veulent le garder ! Si, si. Et pour cause, il sera exposé dans la maison natale de Nasrallah Sfeir à Reifoun. En tout cas, c'est le motif officiel du siège patriarcat, pour éviter el-jorsa sans doute, le ridicule d'avoir commis une telle bourde. Autre motif évoqué, son poids pour les pauvres porteurs lors de la cérémonie religieuse cet après-midi. 220 kg de lourdeur ! L'artiste n'y a pas pensé, smallah. Mince alors, en réfléchissant bien, je dirais que nous avons commis une erreur les amis, nous n’aurions pas dû confier cette mission à Tom Cruise. L’enterrement nous aurait ôté cette horreur de la vue une fois pour toutes !
Le cercueil du patriarche Sfeir (2019) vs le cercueil du pape Jean-Paul II (2005) |
Après un modeste hommage que j'ai rendu à ce grand homme de notre pays, Nasrallah Sfeir, et la multitude de témoignages authentiques de votre côté chers lectrices et lecteurs, exprimés sur mon mur, sur le vôtre et ailleurs, je pensais disposer de quelques jours off-line. Une aimable personne a fait preuve de générosité en comparant mon encensement lyrique aux oraisons funèbres de Bossuet, ce prédicateur français maitre incontesté de l'éloquence et de cet art oratoire, auteur d'une figure de style restée dans la littérature, « Madame se meurt ! Madame est morte ! », prononcée à la basilique Saint-Denis en 1670 lors des funérailles d'Henriette d'Angleterre, épouse de son cousin Philippe d'Orléans, frère de Louis XIV, morte à l'âge de 26 ans.
Ce 15 mai de l’an de grâce 2019 aurait dû être un jour historique, de deuil, de recueillement et de réflexion. La dépouille du défunt devait quitter l'hôpital Hôtel-Dieu de Beyrouth pour Bkerké, le siège du patriarcat maronite d'Antioche et de tout l'Orient. Les obsèques sont prévues pour jeudi 17h. On attend près de 50 000 citoyens de toutes les confessions, chrétiennes et msulmanes. Sur le plan officiel, seront présents, le président de la République libanaise, Michel Aoun, le Premier ministre, Saad Hariri et le chef du Parlement, Nabih Berri, ainsi que le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et des représentants du Vatican, du Qatar et d'Arabie saoudite. Tous les partis politiques libanais viendront rendre un dernier hommage à Nasrallah Sfeir -avec une participation spéciale pour le parti des Forces libanaises (à dominante chrétienne) et le Parti socialiste progressiste (à dominante druze), étant donné le rôle déterminant joué par le défunt dans la réconciliation de la Montage- à l'exception du Hezbollah.
Celles et ceux qui sont touchés par le départ du patriarche maronite étaient censés s'isoler du monde extérieur ou descendre dans la rue, faire silence ou méditer, se tourner vers eux-mêmes ou vers Dieu pour prier. Comme un bon nombre d'entre vous, j'ai eu l'idée de suivre le "direct" sur l'événement via internet, faute de pouvoir y participer. Avouez, bien mal nous en a pris.
Je fus d'emblée quelque peu contrarié par la présence massive des drapeaux du parti des Forces libanaises. Soyons clairs, chacun est libre d'exprimer ses émotions par rapport au décès du patriarche maronite de la manière qu'il juge la plus appropriée. Je comprends parfaitement le pourquoi du comment de la chose. Mais enfin, pourquoi s'approprier un symbole national qui permet de ratisser large, au-delà de la communauté maronite et du parti des FL? Que personne ne soit vexé, il y avait une raison à s'interdire cela et celle-ci est simple. Les justifications de ce qui s'est passé sont certainement valides, mais une telle appropriation réduit et rapetisse ce grand homme trans-communautaire et trans-partisan. Un ou deux drapeaux du parti ici et là, aurait été suffisant pour faire passer le message. Par contre, imposer les drapeaux FL en masse au point d’engloutir le drapeau du Liban, à supposer que c'était spontané, était le moins qu'on puisse dire, inconvenant. Bon, il y a plus grave.
Justement, ensuite, je fus agacé par les pétards et les youyous qu’on a entendu dans le background à un certain moment, notamment à l'arrivée du cercueil à Bkerké. Ça alors, mais depuis quand elferqaï3 wel tzoulghout accompagnent le cercueil d'un patriarche ? On m’a déjà rapporté une vidéo sur cette mode populaire contemporaine surréaliste, minoritaire, Dieu merci. J’ai projeté en parler, mais l’actualité a relégué le sujet aux calendes grecques. Non mais depuis quand cette hérésie fait partie de la culture funèbre libanaise pour un homme âgé de 99 ans ? Dans le contexte d’un enterrement, les pétards et les youyous n’ont pas leur place, il dénature la cérémonie et l'ambiance. J’ai enterré père et mère il y a bien des années. Je me souviens encore comme si c’était hier. Le moment le plus émouvant pour moi c’était l’accueil des cercueils dans la tristesse, les pleurs, la prière et les magnifiques chants religieux maronites et syriaques, et au rythme des cloches qui sonnaient le glas et de rien d’autre. Les pétards et les youyous dans un enterrement constituent un acte déplacé en général et un manque de respect flagrant dans le cas particulier de Mar Nasrallah Boutros Sfeir. Oh mais il y avait beaucoup plus grave que tout cela!
A ce propos, enfin, je vous demande deux secondes pour bien choisir mes mots. Je fus, et pas le seul, irrité et indigné, énervé et exaspéré, mis en colère et fou de rage, à la vue de ce cercueil tarabiscoté, une horreur artistique. Rudy Rahmé est peut-être un sculpteur créatif et très doué à ses heures perdues. Mais une chose est sûre, son œuvre est d’une laideur indescriptible. Il a beau mettre du bois de cèdre de la région des Arz, du bois d’olivier de la Vallée de Qannoubine, de la roche du Kesrouan, son cercueil reste hideux. Non mais franchement depuis quand on recourt à trois matériaux pour créer un cercueil ? Et encore, il y a le plâtre d'une tête moulée ou sculptée à la hâte, disproportionnée par rapport au reste ! Et ce n’est pas tout, si vous regardez bien, vous verrez même l’époxy et l’enduit pour combler les vides. Rudy Rahmé s’est fait plaisir à la manière d’un artiste ayant une imagination sans inspiration, incapable de penser une seconde à qui est destinée son œuvre. Désolé, ce cercueil est raté et totalement indigne de cette dernière grande personnalité à entrer dans le Panthéon libanais, Mar Nasrallah Boutros Sfeir.
La question est maintenant de savoir qui a donné le feu vert pour une telle horreur artistique ? Je pense comme vous ! Eh oui, ce n’est pas par hasard si j’ai fait allusion à lui dans mon hommage dimanche dernier. C’est sans l’ombre d’un doute la signature de quelqu’un qui se regarde dans le miroir tous les matins et se teint les cheveux tous les mois. Vous parlez d’un déclin et du dernier des Mohicans ! Que ça reste entre nous, j’ai proposé à Tom Cruise une mission impossible à réaliser en 24 heures, remplacer cette laideur abjecte par une simple copie du simple cercueil du simple pape Jean-Paul II, mort en 2005 et canonisé depuis, voir photo ci-jointe. A tout hasard, le cercueil que certains fidèles de mauvais goût ont choisi pour le patriarche Nasrallah Sfeir est à gauche et celui de saint Jean-Paul II à droite. La beauté est dans la simplicité car « la simplicité est la sophistication suprême », à en croire Léonard de Vinci. S’il est donné au patriarche maronite de dire un dernier mot, il s’adresserait à Rudy Rahmé avec un sourire narquois et la rime : ton cercueil est hideux et étroit, tellement pompeux que tu peux le garder pour toi 😊
Post-scriptum 🤔
Aux dernières nouvelles, Tom Cruise a réussi sa mission, le cercueil du sculpteur Rudy Rahmé sera bel et bien remplacé pour la cérémonie d'hommage national. Minute ! ne nous réjouissons pas trop vite. Il ne le sera pas parce qu’il est laid, pompeux et indigne du défunt. Comment vous l’annoncez ? Euh, désolé, mais ils veulent le garder ! Si, si. Et pour cause, il sera exposé dans la maison natale de Nasrallah Sfeir à Reifoun. En tout cas, c'est le motif officiel du siège patriarcat, pour éviter el-jorsa sans doute, le ridicule d'avoir commis une telle bourde. Autre motif évoqué, son poids pour les pauvres porteurs lors de la cérémonie religieuse cet après-midi. 220 kg de lourdeur ! L'artiste n'y a pas pensé, smallah. Mince alors, en réfléchissant bien, je dirais que nous avons commis une erreur les amis, nous n’aurions pas dû confier cette mission à Tom Cruise. L’enterrement nous aurait ôté cette horreur de la vue une fois pour toutes !