dimanche 22 décembre 2019

Hassann Diab doit renoncer au gouvernement mort-né qu’il compte former : seule une personnalité qui a un poids politique important et un gouvernement techno-politique polychrome sont capables d’éviter au Liban le pire (Art.695)


C’est de la folie d’espérer sortir le #Liban indemne de la crise en perdant encore du temps sur ce gouvernement mort-né en préparation. Hassann Diab n’est absolument pas l’homme de la situation. C’est un tocard, un mauvais cheval qui ne finira pas sa course ! Cela pour diverses raisons.

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❎ Il a été désigné par 69 députés qui tournent tous sur la même orbite et autour de la même planète, 8-Mars. Hezbollah, Amal, Courant patriotique libre, Tashnag, Marada, Hezb el-Qawmé el-Souré, Jamil el-Sayyed, Faïssal Karamé, Élie Ferzli, Talal Erslane, etc. Cherchez l'erreur, enfin, la cohérence !

❎ Qu’il le veuille ou pas, Hassann Diab a été habillé par la maison « pro-Hezb et pro-Assad ». De ce fait, il n’aura pas la « confiance » de la communauté internationale, puisque le premier est considéré comme une entité terroriste et le second comme un tyran sanguinaire, non moins terroriste pour autant.

❎ C’est la première fois de l’histoire du Liban qu’un Premier ministre, poste attribué à la communauté sunnite selon le Pacte national islamo-chrétien de 1943, accède au Grand sérail avec seulement 6 voix sunnites sur les 69 qu’il a obtenu, moins de 10 % du suffrage parlementaire. C’est un détail pour les ex 8-Mars, HD aussi, mais la rue sunnite ne l’entend pas de cette oreille, elle gronde ! Elle a l’impression d’être marginalisée par le quatuor Nasrallah-Berri-Bassil-Aoun.

❎ Hassann Diab est le technocrate dans toute sa splendeur, un homme déconnecté de la réalité. Faire un CV de 136 pages, c’est être tellement narcissique au point d’oublier le principe de base d’un curriculum vitæ, détailler le parcours et les compétences dans un document court.

❎ Wiam Wahab est semble-t-il le premier à avoir proposé sa désignation, ce qui est suffisant pour s’en inquiéter. La romanisation de son nom, renvoie l’inconscient occidental à un autre compatriote soupçonné un temps d’être impliqué dans un attentat terroriste à Paris. Comble du malheur, il se teint les cheveux, donc c’est un homme qui ne sera pas disponible pendant une heure ou deux, tous les dix jours. Vous imaginez la tête de Macron, quand il entendra : ‘ah non, samedi à midi, je peux pas, هيدى يوم الصبغة’. Eh bien, انشاء الله تظبط.

❎ Trêve de plaisanterie, Hassann Diab porte un boulet lourd, il a été ministre dans le gouvernement de Najib Mikati. Pendant trois ans, lui et ses collègues ont laissé les frontières syro-libanaises grandes ouvertes à la fois aux miliciens du Hezbollah, aux jihadistes et aux réfugiés syriens, avec toutes les conséquences que nous connaissons. Aujourd’hui, nous sommes avec le casse-tête de 1,5 million de ressortissants syriens, qui ne sont pas prêts de rentrer dans leur pays et dont la présence prolongée au Liban a fait passer au rouge tous les voyants. Une partie de l’actuelle crise financière du dollar est dû à cette présence, personne n’en parle. A long terme, l’identité libanaise est sérieusement menacée par le plan pernicieux de Bachar el-Assad, coloniser le Liban via les réfugiés syriens, personne n’en parle non plus.

❎ De par sa désignation monochrome, les forces de l’ex 8-Mars, même s’il est décidé à devenir un Premier ministre indépendant, HD ne pourra pas l’être, puisqu’il n’aura aucune marge de manœuvre. Sa survie au Parlement dépendra de ceux qui l’ont nommé. Et ce qui est encore plus inquiétant c’est qu’il ne l’a pas été quand il était ministre : intégration dans un gouvernement 8-marsien, ouverture vers l’Iran, embauche de 8 000 profs sous contrat dont 3 500 pour la seule année électorale de 2013, etc.

❎ Hassann Diab est un mauvais gestionnaire de l’argent public. Il a passé une grande partie de son temps au ministère, un peu moins de trois ans, à préparer deux livres auto-promotionnels de 1 000 et de 600 pages, sans grand intérêt, invendables en librairie, destinés naturellement à être distribuer à la famille, aux amis et à quelques relations. Le gigantesque album-photo et surtout les légendes (lien dans les commentaires), montrent que nous avons affaire à une personnalité narcissique et immature. Pire encore, Hassan Diab a utilisé de grandes ressources du ministère, personnel et matériel, et a gaspillé l’argent public, pour réaliser un projet purement personnel. Circonstance aggravante, il l’a fait alors qu’il était démissionnaire, expédiant les affaires courantes et sachant très bien qu’il allait faire ses cartons quelques mois plus tard.

❎ Sa première interview accordée avant-hier à la chaine al-Hadath est surréaliste. Les Libanais ont découvert un homme impassible, maitrisant la langue de bois comme aucun politicien, partisan de la politique de l’autruche et bien évidemment, nombriliste. Il avait en arrière-plan sa propre photo ! Sur le fond, c’est un piètre politicien. Il est pour des élections législatives anticipées, comme le répète naïvement la société civile, ce qui n’est absolument pas possible au Liban, à moins de décider de piétiner la Constitution de la République libanaise. La seule façon constitutionnelle de les obtenir c’est de pousser les députés actuels à la démission comme je le réclame dans une pétition.

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✅ Parlons peu, parlons bien. Si Hassann Diab a une once de patriotisme, il doit renoncer sur le champ à la mésaventure du gouvernement mort-né qu’il compte former. Le Premier ministre désigné n’est pas à la hauteur de la mission pour toutes les raisons évoquées précédemment.

Et combien même, ce n’est pas un Premier ministre « technocrate » qu’il nous faut. Ni un « indépendant ». Ni un « spécialiste ». Ni même un « compétent ». Nous faisons fausse route et nous perdons un temps précieux. Tout cela est important mais secondaire étant donné l’urgence de la situation, les enjeux et les risques. Ce qu’il nous faut avant tout c’est un chef de gouvernement et des ministres qui inspirent CONFIANCE.

▶️ D’une part, la confiance des Libanais. Il ne faut pas se leurrer, le nouveau Premier ministre et son gouvernement, quelle que soit sa forme, seront amenés à imposer de grands sacrifices au peuple et aux responsables, afin de sauver le Liban de l’abîme. Qui dit le contraire est un amateur ou un imposteur ! Prenons l’une des revendications de la révolution, récupérer les fonds volés. Croyez-vous vraiment qu’un technocrate retranché dans sa tour d’ivoire soit capable d’atteindre cet objectif au pays du Cèdre ? Autre exemple, le dollar à 1 500 LL, c’est une époque révolue. Qui est capable à votre avis, d’annoncer urbi et orbi le nouveau taux officiel de change ? Ce technocrate du haut du balcon de sa tour d’ivoire ? On parle en coulisse d’une hausse de la TVA. Qui est capable de mettre en route une telle option ? Et si nous voulons dégraisser le mammouth, l’administration, pour éliminer les emplois fictifs ? Et si nous voulons sanctionner les auteurs de branchement illégal sur le réseau électrique et d’eau potable aux quatre coins du territoire libanais ? Et si nous voulons assainir la gestion du port et de l’aéroport de Beyrouth ? Seule une personnalité qui a un poids politique important et un gouvernement techno-politique polychrome en sont capables.

▶️ D’autre part, la confiance des pays arabes et occidentaux, dont le soutien politique et les aides financières sont déterminants pour éviter au Liban la faillite totale et l’écroulement de son système bancaire. Certains Libanais, notamment les bobos-révolutionnaires et les cocos-révolutionnaires, n'ont toujours pas compris qu'il y a un risque important que la population perde sérieusement une partie de son agent, gagné à la sueur de son front. Il va falloir descendre de sa tour d'ivoire. Non mais qui croit une seconde qu’un technocrate qui ne représente personne, déconnecté de la réalité, soit en mesure de débloquer les 11 milliards de dollars promis par la conférence CEDRE pour booster l'économie libanaise ? Là encore, seule une personnalité qui a un poids politique important et un gouvernement techno-politique polychrome en sont capables.

🇱🇧 Dans le contexte actuel, étant donné tous les paramètres, les enjeux et les risques, seul Saad Hariri remplit les conditions. Il n’est pas sans défaut, mais il a le poids politique qu’il faut. Ce n’est pas une raison pour lui donner un chèque en blanc. Le chef du Futur doit commencer par abandonner son caprice de diva et sa stratégie populiste : n’accepter de diriger qu’un gouvernement de technocrates, alors qu’il est la principale figure politique libanaise depuis 14 ans ! Enno ma3lé. Tous les autres protagonistes, de la société civile au parti des Forces libanaises, doivent abandonner leurs chimères, l'idée des technocrates qui décident du fond de leurs tours d’ivoire. Quant à la population libanaise, elle doit demeurer mobiliser plus que jamais et bien davantage que dans le passé pour bâtir le nouveau Liban. Nous ne sommes qu’au début de la route. Nous devons concentrer notre énergie pour peser sur les décisions politiques et pas la perdre sur le choix de personnes inadaptées et des projets utopiques. 🤺


© 2011-2020 Bakhos Baalbaki