jeudi 19 décembre 2019

Nomination de Hassan Diab comme Premier ministre au Liban : il n’y a rien à espérer de ce technocrate, mauvais gestionnaire de l'argent public, nombriliste et piètre politicien, qui accède au pouvoir grâce au Hezbollah et ses alliés (Art.693)


Quelle saugrenue idée de nommer au poste de Premier ministre quelqu’un dont la romanisation du nom, Hassan Diab, renvoie à un individu libano-canadien que la justice française a soupçonné un moment d’être impliqué dans l’attentat terroriste qui a visé la synagogue de la rue Copernic à Paris en 1980 ! حسن دياب و حسان دياب, ohhh la Pythie est formelle, c’est un signe de très mauvais augure, même si le premier a été relaxé faute de preuves et le second est un ingénieur respecté en génie informatique, agréé au Royaume Uni et en Australie, et vice-président des programmes externes régionaux de l'American University of Beirut (AUB) depuis une douzaine d'années.

Le boulet de Hassann Diab, qu'il trainera toute sa vie où qu'il soit, au Grand sérail compris, est d’avoir été ministre de l’Éducation et de l'Enseignement supérieur du gouvernement issu du coup de force des chemises noires organisé par Hassan Nasrallah avec la complicité de Michel Aoun, Nabih Berri et Walid Joumblatt le 12 janvier 2011, qui a conduit au remplacement de Saad Hariri, par un hezbollahi-compatible et ami personnel du tyran de Damas, Najib Mikati.

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Son ministère a été marqué par une volonté d'établir des "accords de coopération" dans le secteur éducatif. Avec qui? La Sorbonne, Oxford, Stanford? Non, plutôt avec la République islamique d'Iran svp. "Nous avons hâte de signer un accord dans un proche avenir pour bénéficier de l'expérience éducative de l'Iran" a osé affirmer un jour Hassann Diab (2012). En pratique, il a profité de son passage dans ce ministère, pour lancer un grand chantier, deux recueils de ses propres interventions et exploits, écrits, interviews, conférences, communiqués de presse, réflexions académiques sérieuses, états d'âme et une immense galerie de photos officielles et mondaines bien évidemment. L'un s'intitule "Le livre documentaire du mandat du ministre-professeur Hassann Diab au ministère de l'Education et de l'Enseignement supérieur", sans grand intérêt en dehors des cercles familial et amical, suivi quelque mois plus tard par "Vers la modernisation : Plan de sauvetage, projets et réalisations du ministère de l'Education et de l'Enseignement supérieur 2011-2013", un livre beaucoup plus intéressant, qui a pourtant fait pschitt à cause du grand désintérêt suscité par le premier. Un ministre victime de son nombrilisme on dirait, qui a passé plus de temps sur ses livres que sur le terrain.

Et ce n'est pas tout. Le problème c'est que Hassann Diab s'est dépêché pour publier ce qui s'est avéré n'être qu'une double auto-promotion, tout juste avant de faire ses cartons et quitter les lieux. Le premier recueil date de mai 2013 et le second de décembre 2013, deux mois avant la fin de la mésaventure de Najib Mikati au Grand sérail. Pire encore, les deux gros volumes, 1 000 et 600 pages (la mégalomanie dans toute sa splendeur !), couchés sur du papier glacé, ont été publiés au frais de la princesse svp, le ministère, l'Etat, donc les contribuables libanais ! Etant donné la quantité du travail assurée par le personnel du ministère et la qualité de la publication, le gaspillage d'argent public pourrait dépasser les 100 000 dollars, pour un intérêt personnel en grande partie. ماشاء الله Certes, Hassann Diab n'est ni le premier ni le dernier responsable a avoir un rapport aussi léger avec l'argent public, mais la nuance ici c'est qu'on a affaire à un technocrate et non à un politicard. Comme quoi, il vaut mieux bannir ce mot du débat actuel, c'est loin d'être un critère suffisant de qualité. Il nous faut des (com)patriotes, intègres et compétents pour la charge publique, point barre, conscients que l'argent public ne sort pas d'une imprimante laser, il est gagné à la sueur du front du peuple libanais.

Pendant trois ans, 2011-2014, Hassann Diab a participé à toutes les décisions prises par un désastreux gouvernement 8-marsien, dont la plus préjudiciable pour le Liban et les Libanais a été d’avoir laissé les frontières syro-libanaises grandes ouvertes. Nous avons payé le prix fort pour cela et nous le paierons encore pendant longtemps.

D’une part, nos frontières sont restées ouvertes à l’afflux de miliciens du Hezbollah vers la Syrie afin de participer à la guerre civile et sauver la tyrannie des Assad, une famille de dictateurs criminels de père en fils qui martyrise le Liban et la Syrie depuis un demi-siècle déjà ! Et d’autre part, nos frontières sont restées ouvertes aussi dans l'autre sens, à l’affluence massive de ressortissants syriens vers le pays du Cèdre, jusqu’à deux millions de personnes (dont le retour n’est pas à l’ordre du jour et dont la présence prolongée risque d'avoir de graves conséquences sur l'avenir du pays), ainsi qu’à l’installation de jihadistes (de Daech et d’al-Nosra entre autres, sur le flanc ouest de l’Anti-Liban), dont les actes terroristes a couté la vie à plusieurs compatriotes et dont l’élimination a nécessité une opération militaire d’envergure et d’importants sacrifices (qui se sont soldés hélas, par leur évacuation vers la Syrie dans des bus climatisés et parfumés à l'eau de rose, sur ordre du parti-milicien du Hezbollah).

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Hassann Diab vient d'être désigné comme Premier ministre par les groupes de députés de Hassan Nasrallah (Hezbollah), de Nabih Berri (Amal) et de Gebrane Bassil (Courant patriotique libre), ainsi que par les députés des partis Tashnag, Marada et Qawmé el-Souré, et d'autres parlementaires dont Jamil el-Sayyed, Faïssal Karamé, Élie Ferzli, Talal Erslane et Farid el-Khazen. A part ce dernier, une espèce hybride, tous ceux qui ont nommé Hassann Diab sont comme par hasard pro-Hezb et pro-Assad. Cherchez l'erreur, enfin, la cohérence ! Détail important au pays du Pacte national islamo-chrétien et des 18 communautés, seuls 6 députés sur les 69 parlementaires qui ont choisi l'ex-ministre de l'Education, sont issus de la communauté sunnite. S'il fallait que ce pouvoir en décomposition se foute de la gueule des Libanais, il ne pouvait pas mieux s'y prendre !

La Pythie est donc catégorique, il n’y a rien à espérer de bon de ce nouveau Premier ministre libanais qui a la faveur à la fois du Hezbollah, une entité classée terroriste par la majorité des pays arabes et occidentaux, et d'une ribambelle de fervents défenseurs de l'axe Dahiyé-Damas-Téhéran. La confiance fera certainement défaut du côté de la communauté internationale, ce qui sera préjudiciable pour relancer l'économie libanaise, freiner la dégradation financière et ramener la prospérité. Nous pouvons encore moins espérer de Hassann Diab, un excellent académicien sans doute (et encore, au conditionnel, c'est qu'il y a des rumeurs sur ses publications et on l'accuse aussi de favoritisme pour caser son fils à l'AUB), mais qui semble être incontestablement un très mauvais gestionnaire de l'argent public et un piètre politicien ayant des choix idéologiques qui laissent beaucoup à désirer. Et là, il y a de quoi douter sérieusement que l'homme soit capable de sortir le Liban de cette grave crise existentielle, ce qui ne manquera pas d'amplifier la colère de la population libanaise qui proteste depuis 64 jours 🤺


© 2011-2020 Bakhos Baalbaki