vendredi 24 avril 2020

Le dollar à 4 000 LL : la nouvelle bataille du Hezbollah pour mettre la main sur la Banque centrale du Liban (Art.782)


🇱🇧 1 $ = 4 000 LL. Et ce n'est pas fini ! Cette hausse vertigineuse aujourd’hui n’est pas le fruit du hasard. Certes, il y a le manque de confiance des Libanais après le spectacle piteux des députés de la nation les deux derniers jours. Il y a également l'expiration du délai accordé par la Banque du Liban (BDL) pour le retrait en dollars des virements envoyés via les sociétés de transferts d'argent internationaux (ex. Western Union, dorénavant les sommes virées seront retirées dans la monnaie du pays, càd en livres libanaises). Mais ces deux facteurs à eux seuls n'expliquent pas l'envolée délirante du billet vert.

Un coup de force, disons un 7-Mai financier, est actuellement mené d’une part, par le Hezbollah et ses partisans, qui contrôlent une partie des bureaux de change, donc du taux $/LL sur le terrain, et d’autre part, par les « hezbollahi-compatibles », les « idiots utiles » et les « gens désespérés », qui manifestent dans la rue contre la BDL et son gouverneur. L’offensive générale a un double objectif, faire tomber Riad Salamé pour la coalition des individus, prendre le contrôle de la banque centrale pour ce qui est du Hezb.

Les manœuvres surviennent au lendemain du marathon législatif organisé par l'inamovible Nabih Berri, qui n'a servi à pas grand-chose à part apporter une bouffée d’oxygène au Hezbollah en légalisant la culture et le commerce du cannabis dans le fief du Hezb dans la Bekaa (pour l’usage médical et industriel), et affecter quelques centaines de milliards de livres libanaises aux hôpitaux publics situés dans les régions des leaders communautaires. Elle survient aussi la veille d’une réunion de haut niveau pour aborder les questions financières du pays et les circulaires de la BDL, voire plus, si l'occasion se présente.

On peut penser ce que l’on veut de Riad Salamé, beaucoup de mal d'ailleurs!, mais les décisions prises par le gouverneur sont ce que l’on peut faire de mieux dans les circonstances difficiles que traverse notre pays. Elles sont logiques, cohérentes et vont quand même dans l’intérêt de la population à moyen terme, en attendant des jours meilleurs. Elles permettent aux détenteurs de comptes en $ de disposer de leur argent à condition de le récupérer en LL selon le taux de change du marché, jamais à l'avantage des clients, cela va de soi. Le but est de lâcher du lest afin d’avoir moins de pression et de demandes sur le dollar, ce qui aurait dû avoir comme conséquence de faire baisser le taux de change. Mais c'est sans prendre en compte les intérêts du Hezb ! La décision parallèle de Riad Salamé d’obliger les banques privées à vendre les dollars en sus exclusivement à la BDL, décision de bon sens prise aussi dans le même but et pour reconstituer les réserves pour les jours sombres, a fortement déplu au Hezbollah car elle réduit ses marges de manœuvre pour influencer le taux $/LL via les bureaux de change et pourrait porter atteinte à ses bénéfices en conséquence. D'où son intervention pour pousser le taux vers le haut en achetant des dollars et nourrir davantage le mécontentement populaire contre la BDL.

Les événements d'aujourd'hui constituent une nouvelle bataille d'une guerre déclarée contre Riad Salamé depuis longtemps. Si le Hezbollah, qui est classé terroriste par les pays arabes et occidentaux (et qui est asphyxié par les sanctions américaines qui touchent également l'Iran de plein fouet), réussit à évincer le gouverneur de la banque centrale libanaise, qui a la confiance de ces mêmes pays arabes et occidentaux, ainsi que de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, il est évident qu'il cherchera à mettre à la tête de la BDL un homme hezbollahi-compatible, comme il l'a fait déjà pour les trois présidences, de la République, du Conseil et du Parlement. Comme tout sera sous le contrôle du Hezbollah, notamment le secteur financier, il y a fort à parier que le Liban sera rapidement mis au ban des nations. Les dons et les prêts des pays arabes et occidentaux, les investissements des hommes d'affaires libanais, arabes et occidentaux, ainsi que les virements de la diaspora libanaise vers le pays natal, baisseront au strict minimum. Il y aura moins de fresh money en dollars et le taux de change $/LL grimpera vers des sommets inimaginables aujourd'hui, 5 000 LL ou 6 900 LL, notre Everest pourrait s'élever à 8 848 LL le dollar. Nous pourrons alors dire adieu à ce qui a fait du Liban, la Suisse de l’Orient, ainsi qu’à une partie des dépôts de ses banques. #no_pasaran


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