Elle s’est illustrée au début de sa nouvelle carrière politicienne il y a deux ans, en se faisant soigneusement photographier arrivée cheveux en l'air et en scooter au Parlement et en votant « Nadine Labaki » pour présider l’Assemblée nationale. « Une position historique » svp car « l’État libanais n’honore pas la réalisatrice libanaise alors qu’elle le mérite ». Par la suite, il y a eu l’épisode rocambolesque sur le kidnapping farfelu de Hariri par Voldemort. « Bien sûr qu’il n’était pas retenu de force par MBS », quand elle travaillait pour le Futur, et un an plus tard quand le Futur lui a tourné le dos, « évidemment qu’il était retenu de force par MBS » ! Il y a eu aussi l’hommage au cowboy Nawaf el-Moussawi, pour son « grand professionnalisme au Parlement », un député que même le Hezbollah ne peut plus voir en peinture. Bavarde sur tous les sujets sauf que les années passent et il n'y a toujours rien, aucun coup de gueule contre l'anomalie que constitue les armes du Hezbollah au Liban, principal obstacle à l'édification d'un Etat de droit et au retour de la prospérité au pays du Cèdre.
Mais oubliez tout cela, aujourd’hui la députée d’Achrafieh est débordée. Il y a d’abord la « plantation de salades » نزلة كرم الزيتون بعد طرنبة البنزين على طريق العدلية. Ce n'est pas que l'idée soit mauvaise, mais bon, avec le projet des « œufs de cailles » sur lequel travaille l'autre député du quartier, l'imminence grise du CPL, Nikos, non mais les Beyrouthins vont se faire des menus de régime d’enfer et oublier tout le reste ! Cette semaine, notre jolie députée était mobilisée pour empêcher l’expulsion de squatteurs âgés à Achrafieh car « on n’expulse pas les gens au milieu de la nuit et en temps de Corona, jusqu'à la fin du mois de juillet ». Peut-être de jour, après le Corona, sous la chaleur d'enfer du mois d'août ? En tout cas, cela ne l’avait pas empêché dans le passé de donner un bon coup de main aux « propriétaires anciens » dans leur offensive au Conseil constitutionnel et de ne pas clairement se prononcer pour la non-expulsion des « locataires anciens » des appartements qu'ils louent en toute légalité et de la ville dans laquelle ils sont installés depuis 40, 50 ou 60 ans.
Autre sujet de mobilisation, l'appel solennel des Libanais-e-s avant-hier, capture d'écran. « Nous sommes tous toi. Comme ça serait beau de porter le voile, ne serait-ce que pour une journée, par respect pour toi et en reconnaissance de ce que tu as enduré. » Tout ça parce qu’une femme voilée qui voulait couper le principal axe routier de Beyrouth, le Ring, s’est fait insulter par un homme de la brigade anti-émeute. La députée était outrée. « La révolution est une femme libanaise, au temps rétrograde de la masculinité et de l’ignorance ». Indépendamment de ce qu'il a dit au juste, incompréhensible d'ailleurs, toute généralisation à partir d’un fait divers est stupide, surtout s’elle a une motivation populiste !
Enfin bref, à part qu’elle manque d’authenticité, Paula Yacoubian semble prendre le Parlement libanais pour une ONG et confondre son métier de députée avec les activités d’une jeune militante ! Je ne sais pas trop ce que vous en pensez les ami-e-s, mais je crois que députée ou militante, ce n’est pas pareil, ni le même prix ni le même coût ni le même salaire. S’il n’y a qu’une réforme à faire passer au pays du Cèdre et une seule, ça serait celle-ci : que chacun fasse son boulot, consciencieusement, et les vaches seront bien gardées au Liban. Mais justement, comment la faire passer ? 😋
PS : Le métier de député ne consiste pas à faire de la poésie et de la prose ou de l’élevage et de l’agriculture -version moderne, branchée, revue et corrigée des mariages et des enterrements des députés de jadis!- encore moins à déposer des projets de loi, plus ou moins utile et plus ou moins bâclé, sans tenir compte de leur chance d’aboutir et d’être adoptés ! Ça serait trop facile et chèrement payé.