vendredi 26 juin 2020

Paula Yacoubian semble prendre le Parlement libanais pour une ONG et confondre son métier de députée avec les activités d’une jeune militante (Art.806)


Elle s’est illustrée au début de sa nouvelle carrière politicienne il y a deux ans, en se faisant soigneusement photographier arrivée cheveux en l'air et en scooter au Parlement et en votant « Nadine Labaki » pour présider l’Assemblée nationale. « Une position historique » svp car « l’État libanais n’honore pas la réalisatrice libanaise alors qu’elle le mérite ». Par la suite, il y a eu l’épisode rocambolesque sur le kidnapping farfelu de Hariri par Voldemort. « Bien sûr qu’il n’était pas retenu de force par MBS », quand elle travaillait pour le Futur, et un an plus tard quand le Futur lui a tourné le dos, « évidemment qu’il était retenu de force par MBS » ! Il y a eu aussi l’hommage au cowboy Nawaf el-Moussawi, pour son « grand professionnalisme au Parlement », un député que même le Hezbollah ne peut plus voir en peinture. Bavarde sur tous les sujets sauf que les années passent et il n'y a toujours rien, aucun coup de gueule contre l'anomalie que constitue les armes du Hezbollah au Liban, principal obstacle à l'édification d'un Etat de droit et au retour de la prospérité au pays du Cèdre.

Mais oubliez tout cela, aujourd’hui la députée d’Achrafieh est débordée. Il y a d’abord la « plantation de salades » نزلة كرم الزيتون بعد طرنبة البنزين على طريق العدلية. Ce n'est pas que l'idée soit mauvaise, mais bon, avec le projet des « œufs de cailles » sur lequel travaille l'autre député du quartier, l'imminence grise du CPL, Nikos, non mais les Beyrouthins vont se faire des menus de régime d’enfer et oublier tout le reste ! Cette semaine, notre jolie députée était mobilisée pour empêcher l’expulsion de squatteurs âgés à Achrafieh car « on n’expulse pas les gens au milieu de la nuit et en temps de Corona, jusqu'à la fin du mois de juillet ». Peut-être de jour, après le Corona, sous la chaleur d'enfer du mois d'août ? En tout cas, cela ne l’avait pas empêché dans le passé de donner un bon coup de main aux « propriétaires anciens » dans leur offensive au Conseil constitutionnel et de ne pas clairement se prononcer pour la non-expulsion des « locataires anciens » des appartements qu'ils louent en toute légalité et de la ville dans laquelle ils sont installés depuis 40, 50 ou 60 ans.

Autre sujet de mobilisation, l'appel solennel des Libanais-e-s avant-hier, capture d'écran. « Nous sommes tous toi. Comme ça serait beau de porter le voile, ne serait-ce que pour une journée, par respect pour toi et en reconnaissance de ce que tu as enduré. » Tout ça parce qu’une femme voilée qui voulait couper le principal axe routier de Beyrouth, le Ring, s’est fait insulter par un homme de la brigade anti-émeute. La députée était outrée. « La révolution est une femme libanaise, au temps rétrograde de la masculinité et de l’ignorance ». Indépendamment de ce qu'il a dit au juste, incompréhensible d'ailleurs, toute généralisation à partir d’un fait divers est stupide, surtout s’elle a une motivation populiste !

Enfin bref, à part qu’elle manque d’authenticité, Paula Yacoubian semble prendre le Parlement libanais pour une ONG et confondre son métier de députée avec les activités d’une jeune militante ! Je ne sais pas trop ce que vous en pensez les ami-e-s, mais je crois que députée ou militante, ce n’est pas pareil, ni le même prix ni le même coût ni le même salaire. S’il n’y a qu’une réforme à faire passer au pays du Cèdre et une seule, ça serait celle-ci : que chacun fasse son boulot, consciencieusement, et les vaches seront bien gardées au Liban. Mais justement, comment la faire passer ? 😋

PS : Le métier de député ne consiste pas à faire de la poésie et de la prose ou de l’élevage et de l’agriculture -version moderne, branchée, revue et corrigée des mariages et des enterrements des députés de jadis!- encore moins à déposer des projets de loi, plus ou moins utile et plus ou moins bâclé, sans tenir compte de leur chance d’aboutir et d’être adoptés ! Ça serait trop facile et chèrement payé.


© 2011-2020 Bakhos Baalbaki