🇹🇷🇸🇾🇮🇷🇷🇺🇱🇧🇪🇺 Il est déterminé à jouer le rôle de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf. Le président turc a cru bravement à l’automne 2019 qu’il peut envahir la #Syrie et défendre les intérêts de la #Turquie sans conséquence. Erdogan a même cru innocemment qu’il peut installer une partie des Syriens réfugiés en Turquie dans une « zone de sécurité » de la Syrie taillée sur mesure au nord du pays comme si de rien n'était. Il a cru naïvement qu’il peut dans la foulée écraser les forces kurdes, ses ennemis jurés, héros de la guerre contre l'organisation jihadiste Daech, sans problème. Recep Tayyip Erdogan a cru bêtement qu’il peut également faire chanter l’Union européenne sur la question des réfugiés syriens, en menaçant d’ouvrir ses frontières, comme sur ce post frontalier avec la Grèce (photo Reuters), si elle ne vient pas à son aide et à son secours, maintenant qu’il est enlisé dans la guerre syrienne. Le gardien de la Sublime porte croit gagner sur tous les fronts, et comble de la mégalomanie, il croit stupidement que le président russe le laisserait faire les bras croisés et sans sourciller.
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La veille du 9e anniversaire du déclenchement de la guerre en Syrie, certains n'ont toujours pas compris, the basic facts. La Syrie est une question vitale pour la Russie. Depuis le 15 mars 2011, Vladimir Poutine poursuit inlassablement les mêmes objectifs, avec une détermination inébranlable.
• Montrer qu’il est le maitre incontesté de la Syrie, son pied-à-terre au Moyen-Orient, son sésame pour la Méditerranée orientale, sa coupe du monde sur Terre. Objectif atteint. La rencontre prévue jeudi entre Poutine et Erdogan à Moscou, en est la meilleure preuve.
• Sauver le soldat Bachar el-Assad. C’est fait à long terme et d’une manière incontestable.
• Permettre au tyran de Damas de récupérer la totalité du territoire syrien, Idlib et Alep comprises. C’est en cours. Grâce d’une part, à la Coalition internationale et les Kurdes principalement, qui ont permis d’écraser les organisations jihadistes (notamment Daech), et aux forces iraniennes et libanaises alliées secondairement, et d’autre part, aux forces turques, dont l’offensive d’octobre à pousser les forces kurdes à remettre sans combat les régions autonomes du nord de la Syrie à Bachar el-Assad. Reste le nord-ouest, c’est tout l’enjeu des batailles actuellement.
• Affaiblir autant les rebelles et les jihadistes syriens, que les Iraniens et les milices satellites de l’Iran, dont le Hezbollah libanais. Si la Russie semble laisser la Turquie agir avec beaucoup de liberté et n’est pas encore intervenue activement pour l’arrêter net, c’est bien sûr pour maintenir l’entente avec Erdogan (concrétisée par l’accord de Sotchi à l’automne dernier, qui a permis le retrait des forces kurdes sur 30 km de profondeur et 120 km de largeur, par rapport à la frontière ; par l’acquisition il y a quelques mois du système russe de défense antiaérienne sophistiquée, les missiles S-400, au grand dam des États-Unis et de l’OTAN ; et bien sûr, par l'inauguration du gazoduc Turkish Stream il y a quelques semaines, pour alimenter la Turquie avec du gaz russe), mais aussi, justement dans ce but, affaiblir tous les protagonistes sur le terrain, et le moins possible, le régime syrien (on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, 3 avions abattus depuis une semaine, ce n'est pas grand-chose dans une guerre dont le volume de destruction est évalué à 400 milliards $). Les lourdes pertes subies par les forces sunnites anti-Assad et chiites pro-Assad dans la région d’Idlib le confirment.
• Faire pression sur les Européens. En laissant le régime syrien humilier la Turquie, à travers les frappes aériennes de jeudi dernier (réalisées forcément sur renseignement et avec le feu vert de la Russie ; 33 soldats turcs tués et autant de blessés), Poutine savait très bien comment aller réagir Erdogan, ouvrir ses frontières avec l’Europe. Les « réfugiés-déplacés syriens » (3,6 millions en Turquie, 1,5/2 millions au Liban et 0,5 million à la frontière turco-syrienne depuis le déclenchement de la bataille d'Idlib), sont une carte précieuse à la fois pour la Turquie, affaiblir l’Europe et obtenir des fonds, et la Russie, affaiblir l’Europe et réhabiliter le régime syrien avec à sa tête, Bachar el-Assad.
• Réintégrer la Syrie dans la communauté internationale. Certes, c'est encore très prématuré, il n'empêche que plus d'une douzaine de vétos brandis contre des projets de résolutions au Conseil de sécurité depuis 9 ans, conjointement avec la Chine, est là pour rappeler aux amnésiques que la Russie ne tolérera pas toute atteinte au plan de reconquête de la Syrie par Bachar el-Assad et la condamnation collective de son protégé par la communauté internationale, quels qu'en soient les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité qu'il a pu commettre en Syrie.
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Une dernière chose qui peut nous intéresser au #Liban. Lors de sa crise de nerfs, Erdogan a fait savoir que « l'Union européenne n'a pas pleinement respecté les exigences de l'accord du 18 mars 2016 ». Menteur. 99% des sommes promises ont été engagées. Et de quelles sommes s'agit-il ? L’accord prévoyait 6 milliards d’euros, afin que la Turquie accepte le retour des migrants qui ont franchi les frontières européennes sur son territoire ! L’#Europe aurait pu fermer hermétiquement ses frontières, monter des murs, ne permettre à personne de les franchir, ne pas verser un centime et laisser Erdogan se débrouiller seul avec sa situation géographique inconfortable et les conséquences de sa politique complaisante à l'égard des jihadistes et des islamistes en Syrie. Mais elle ne l’a pas fait parce qu’elle a des valeurs. C'est dans ce cadre qu'elle a accueilli des centaines de milliers de migrants syriens en neuf ans, quand de grands pays comme la Russie, la Chine et le Japon n'en ont accueilli personne ou presque.
Erdogan poursuit : « Ils (les Européens) disent qu'ils enverront un milliard d'euros de plus. Qui essayez-vous de tromper? On ne veut plus de cet argent. La Turquie a dépensé 40 milliards de dollars pour accueillir les réfugiés et trouvera cet argent elle-même. » Ce chiffre a retenu mon attention. Si Erdogan dit vrai, le Liban qui accueille de 1,5 à 2 millions de réfugiés et de déplacés syriens (la moitié du chiffre turc), a dû dépenser disons 20 milliards $ pour faire face aux réfugiés et aux déplacés syriens, sans bénéficier pour autant d’un accord financier si juteux de la part de l’Europe (les 6 milliards d’euros de cadeau !) et de facilité politique (exemption de visa pour les Turcs, obtenue encore grâce au chantage !).
Toujours est-il qu’à l’occasion de l’échéance du paiement de 1,2 milliard $ d’eurobonds, ce lundi 9 mars, je me suis prononcé non seulement pour le non-paiement, mais aussi et surtout, pour l’effacement d’au moins un tiers de la dette souveraine du Liban, soit près de 30 milliards $, afin d'espérer sauver le pays du Cèdre de l'effondrement général qui n'est dans l'intérêt de personne et d'aucun pays au monde. Et pour cause, la communauté internationale, notamment arabe, européenne et américaine, n’a pas assumé totalement ses responsabilités et allégé comme il se doit le poids de la guerre en Syrie sur le Liban, l'afflux massif de ressortissants syriens jusqu'à constituer l'équivalent de la moitié de la population libanaise ! La suppression d’une partie de notre dette publique serait donc la juste compensation. Mais contrairement à Erdogan, nous devons obtenir cette mesure par la négociation et non par un chantage abjecte, sans oublier de faire payer les trois pays qui ont envenimé la situation en Syrie, l'Iran, la Chine et la Russie.
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La veille du 9e anniversaire du déclenchement de la guerre en Syrie, certains n'ont toujours pas compris, the basic facts. La Syrie est une question vitale pour la Russie. Depuis le 15 mars 2011, Vladimir Poutine poursuit inlassablement les mêmes objectifs, avec une détermination inébranlable.
• Montrer qu’il est le maitre incontesté de la Syrie, son pied-à-terre au Moyen-Orient, son sésame pour la Méditerranée orientale, sa coupe du monde sur Terre. Objectif atteint. La rencontre prévue jeudi entre Poutine et Erdogan à Moscou, en est la meilleure preuve.
• Sauver le soldat Bachar el-Assad. C’est fait à long terme et d’une manière incontestable.
• Permettre au tyran de Damas de récupérer la totalité du territoire syrien, Idlib et Alep comprises. C’est en cours. Grâce d’une part, à la Coalition internationale et les Kurdes principalement, qui ont permis d’écraser les organisations jihadistes (notamment Daech), et aux forces iraniennes et libanaises alliées secondairement, et d’autre part, aux forces turques, dont l’offensive d’octobre à pousser les forces kurdes à remettre sans combat les régions autonomes du nord de la Syrie à Bachar el-Assad. Reste le nord-ouest, c’est tout l’enjeu des batailles actuellement.
• Affaiblir autant les rebelles et les jihadistes syriens, que les Iraniens et les milices satellites de l’Iran, dont le Hezbollah libanais. Si la Russie semble laisser la Turquie agir avec beaucoup de liberté et n’est pas encore intervenue activement pour l’arrêter net, c’est bien sûr pour maintenir l’entente avec Erdogan (concrétisée par l’accord de Sotchi à l’automne dernier, qui a permis le retrait des forces kurdes sur 30 km de profondeur et 120 km de largeur, par rapport à la frontière ; par l’acquisition il y a quelques mois du système russe de défense antiaérienne sophistiquée, les missiles S-400, au grand dam des États-Unis et de l’OTAN ; et bien sûr, par l'inauguration du gazoduc Turkish Stream il y a quelques semaines, pour alimenter la Turquie avec du gaz russe), mais aussi, justement dans ce but, affaiblir tous les protagonistes sur le terrain, et le moins possible, le régime syrien (on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, 3 avions abattus depuis une semaine, ce n'est pas grand-chose dans une guerre dont le volume de destruction est évalué à 400 milliards $). Les lourdes pertes subies par les forces sunnites anti-Assad et chiites pro-Assad dans la région d’Idlib le confirment.
• Faire pression sur les Européens. En laissant le régime syrien humilier la Turquie, à travers les frappes aériennes de jeudi dernier (réalisées forcément sur renseignement et avec le feu vert de la Russie ; 33 soldats turcs tués et autant de blessés), Poutine savait très bien comment aller réagir Erdogan, ouvrir ses frontières avec l’Europe. Les « réfugiés-déplacés syriens » (3,6 millions en Turquie, 1,5/2 millions au Liban et 0,5 million à la frontière turco-syrienne depuis le déclenchement de la bataille d'Idlib), sont une carte précieuse à la fois pour la Turquie, affaiblir l’Europe et obtenir des fonds, et la Russie, affaiblir l’Europe et réhabiliter le régime syrien avec à sa tête, Bachar el-Assad.
• Réintégrer la Syrie dans la communauté internationale. Certes, c'est encore très prématuré, il n'empêche que plus d'une douzaine de vétos brandis contre des projets de résolutions au Conseil de sécurité depuis 9 ans, conjointement avec la Chine, est là pour rappeler aux amnésiques que la Russie ne tolérera pas toute atteinte au plan de reconquête de la Syrie par Bachar el-Assad et la condamnation collective de son protégé par la communauté internationale, quels qu'en soient les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité qu'il a pu commettre en Syrie.
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Une dernière chose qui peut nous intéresser au #Liban. Lors de sa crise de nerfs, Erdogan a fait savoir que « l'Union européenne n'a pas pleinement respecté les exigences de l'accord du 18 mars 2016 ». Menteur. 99% des sommes promises ont été engagées. Et de quelles sommes s'agit-il ? L’accord prévoyait 6 milliards d’euros, afin que la Turquie accepte le retour des migrants qui ont franchi les frontières européennes sur son territoire ! L’#Europe aurait pu fermer hermétiquement ses frontières, monter des murs, ne permettre à personne de les franchir, ne pas verser un centime et laisser Erdogan se débrouiller seul avec sa situation géographique inconfortable et les conséquences de sa politique complaisante à l'égard des jihadistes et des islamistes en Syrie. Mais elle ne l’a pas fait parce qu’elle a des valeurs. C'est dans ce cadre qu'elle a accueilli des centaines de milliers de migrants syriens en neuf ans, quand de grands pays comme la Russie, la Chine et le Japon n'en ont accueilli personne ou presque.
Erdogan poursuit : « Ils (les Européens) disent qu'ils enverront un milliard d'euros de plus. Qui essayez-vous de tromper? On ne veut plus de cet argent. La Turquie a dépensé 40 milliards de dollars pour accueillir les réfugiés et trouvera cet argent elle-même. » Ce chiffre a retenu mon attention. Si Erdogan dit vrai, le Liban qui accueille de 1,5 à 2 millions de réfugiés et de déplacés syriens (la moitié du chiffre turc), a dû dépenser disons 20 milliards $ pour faire face aux réfugiés et aux déplacés syriens, sans bénéficier pour autant d’un accord financier si juteux de la part de l’Europe (les 6 milliards d’euros de cadeau !) et de facilité politique (exemption de visa pour les Turcs, obtenue encore grâce au chantage !).
Toujours est-il qu’à l’occasion de l’échéance du paiement de 1,2 milliard $ d’eurobonds, ce lundi 9 mars, je me suis prononcé non seulement pour le non-paiement, mais aussi et surtout, pour l’effacement d’au moins un tiers de la dette souveraine du Liban, soit près de 30 milliards $, afin d'espérer sauver le pays du Cèdre de l'effondrement général qui n'est dans l'intérêt de personne et d'aucun pays au monde. Et pour cause, la communauté internationale, notamment arabe, européenne et américaine, n’a pas assumé totalement ses responsabilités et allégé comme il se doit le poids de la guerre en Syrie sur le Liban, l'afflux massif de ressortissants syriens jusqu'à constituer l'équivalent de la moitié de la population libanaise ! La suppression d’une partie de notre dette publique serait donc la juste compensation. Mais contrairement à Erdogan, nous devons obtenir cette mesure par la négociation et non par un chantage abjecte, sans oublier de faire payer les trois pays qui ont envenimé la situation en Syrie, l'Iran, la Chine et la Russie.